lundi 4 octobre 2010

L’Inde se met au vert


De nombreux industriels s’accordent à le dire, s’implanter en Europe coûte trop cher. Les raisons ? Un coût de main-d’œuvre élevé, une réglementation stricte, et, pour certains pays, l’obligation de prendre en charge les frais de dépollution des sols qui, selon eux, devraient être à la charge des collectivités… La solution ? Se tourner vers des pays plus « rentables », qui, de surcroît, détiennent une bonne partie des ressources minières… des pays tels l’Inde. Cependant, plus encore que les retombées économiques, l’Inde porte une importance grandissante à l’égard de considérations écologiquement et socialement plus soutenables… au détriment des industriels.

L’Inde s’est rapidement préoccupée de la protection de l’environnement : déjà, en 1878, alors que les britanniques faisaient le constat de la diminution rapide des ressources naturelles et des espèces (notamment du gibier), l’Indian Forest Act est édicté en vue de réglementer l’exploitation forestière. Plus récemment, l’Environment Protection Act de 1986 a permis de favoriser la conservation et une meilleure gestion des écosystèmes ainsi que du traitement des eaux et des déchets. Depuis, plusieurs textes ont fait leur apparition. Cependant, la protection de l’environnement reste une problématique de taille pour des pays tels que l’Inde.

Les industriels sont la cause de nombreuses externalités : pollution des eaux et des sols, déplacement de populations, implantation sur des sols sacrés,… Face à ces conséquences peu maîtrisées, l’Inde a décidé de réagir en fixant de réelles contraintes aux industriels. Lafarge a ainsi subi cette politique plus stricte en se voyant refuser un projet de mine de calcaire et d’une cimenterie dans une zone himalayenne. En effet, le projet aurait un impact non négligeable sur la biodiversité sur cette zone, un projet prévu à seulement 5 km d’un parc naturel. De plus, 60 à 82 familles devraient être déplacées pour permettre la réalisation de ce projet. Les négociations avec les habitants sont en cours : Lafarge leur promet des emplois et a fait construire des centres médicaux et informatiques…

L’Inde a doublé sa production de ressources minières en presque 20 ans. Mais cela ne s’est pas fait sans mal… Le Centre de la science et l’environnement (CSE) basé à Dehli affirme que la moitié des 50 districts où la production de minerais est la plus importante compte parmi les plus pauvres en termes d’indicateurs sociaux. De plus, la cohabitation entre la population locale et les industriels crée de plus en plus de tensions et favorise des mouvements de forte contestation. Le gouvernement souhaite ainsi une meilleure répartition des revenus issus de l’exploitation de ces ressources. Une nouvelle loi d’exploitation minière devrait être proposée cet hiver.

Cette politique gouvernementale est notamment portée par Jairam Ramesh, ministre de l’environnement. Les études d’impact sont désormais décisives dans l’acceptation de nouveaux projets sur le sol indien : ainsi, près de 100 projets ont été refusés depuis 2009, dont a construction d’un nouvel aéroport à Bombay. Jairam Ramesh s’est notamment fait connaître en interdisant la culture commerciale des aubergines génétiquement modifiées. L’un de ses objectifs, et des plus honorables, est de mesurer la croissance économique avec un indicateur alternatif au PNB, prenant davantage en compte les critères environnementaux et sociaux. Ainsi, à l’image de Muhammad Yunus qui a développé le concept de microcrédit à travers la Grameen Bank, on peut espérer que l’Inde soit encore précurseur dans le domaine en impulsant une nouvelle approche de modèle économique prenant en compte les critères sociaux et environnementaux…


Source :
Le Monde
http://www.lemonde.fr/planete/article/2010/09/30/l-inde-impose-aux-industriels-d-etre-plus-verts_1418202_3244.html

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