mardi 22 février 2011

L'énergie au coeur des débats


Alors que le gouvernement affichait des objectifs ambitieux en termes d’énergies renouvelables, certaines tentations d’ordre économique amènent les responsables politiques à mettre parfois l’environnement au second plan. J-L Borloo, ancien Ministre de l’Ecologie, de l’Energie et du Développement Durable a ainsi autorisé courant 2010 plusieurs industriels à exploiter le gaz de schiste présent dans les sols français, sans prise en compte des impacts environnementaux que cela engendre. Au-delà de la polémique sur le gaz de schiste, l’actualité nous informe d’une nouvelle réglementation pour le marché du photovoltaïque. Retour sur ces débats qui détermineront le marché énergétique français de demain.


Le gaz de schiste : fort impact sur l’environnement

L’exploitation du gaz de schiste consiste à forer le sol sur environ 2000 mètres de profondeur et d’y injecter à forte pression des milliers de mètres cubes d’eau, du sable ainsi que près de 500 produits chimiques différents (méthode dite de fracturation hydraulique). Cette méthode permet de fissurer la roche souterraine qui libère alors un gaz qui sera ensuite acheminé vers la surface. Chaque forage ne permettant d’extraire qu’une quantité limitée de gaz, il faut créer un grand nombre de puits pour exploiter cette ressource (environ tous les 200 mètres).


Les dégâts écologiques sont multiples : pollution des nappes phréatiques impliquant des dangers de santé publique, gaspillage de l’eau (utilisation massive d’eau douce – près de 10 millions de litres d’eau par puits), utilisation massive de camions pour le processus de retraitement des eaux et détérioration des paysages. Ces exploitations sont fortement répandues notamment aux Etats-Unis et au Canada. Le gaz de schiste représente en effet 15 à 20% de la production totale de gaz aux Etats-Unis.


Malgré les controverses relatives à ces exploitations sur le continent américain, notamment dénoncées à travers le documentaire « Gasland », les industriels Total, GDF, Schuepbach et Devon ont obtenu trois permis d’exploitation en mars 2010 sur les départements de l’Ardèche, de la Drôme, de la Lozère, de l’Hérault, du Gard et du Vaucluse (près de 10 000 km2 au total). L’autorisation quant à la prospection de gaz de schiste a été délivrée par l’ancien ministre de l’Ecologie, de l’Energie et du Développement Durable, M J-L Borloo, faisant ainsi abstraction des engagements du Grenelle de l’Environnement. L’objectif pour la France serait d’augmenter son indépendance énergétique en limitant les importations depuis les Etats-Unis. Cette autorisation a été délivrée par le ministère en toute opacité, sans concertation des élus locaux concernés qui demandent de fait une annulation de ces permis d’exploitation.

Face aux nombreuses oppositions notamment portées par José Bové, les élus locaux, ainsi que l’ensemble des associations environnementales, Nathalie Kosciusko-Morizet, Ministre de l’Ecologie, ainsi que Eric Besson, Ministre de l’Industrie, de l’Energie et de l’Economie Numérique ont demandé aux industriels de reporter leurs travaux d’exploration et ont commandité une étude relevant notamment les impacts environnementaux au Conseil général de l'industrie, de l'énergie et des technologies (CGIET) et au Conseil général de l'environnement et du développement durable (CGEDD). Ce n’est pas assez selon les opposants au gaz de schiste qui réclament à ce que les permis d’exploitation soient purement et simplement annulés.

Nathalie Kosciusko-Morizet se veut rassurante : si l’exploitation du gaz de schiste devait se faire en France, elle n’impliquerait pas l’utilisation de la technologie américaine dont on connaît en partie les impacts environnementaux. Dans le cas contraire, ces gisements ne seraient pas exploités. Pour sa part, le PDG de Total ne comprend pas les vives réactions de l’ensemble des parties prenantes tant que les industriels n’aient pu déterminer le potentiel existant en France…


Nouvelle réglementation sur le marché du photovoltaïque

Les énergies renouvelables restent cependant au cœur des préoccupations du gouvernement. Ainsi, le rapport Charpin-Trink délivré au gouvernement fait état du marché du photovoltaïque en relevant un certain nombre de questions essentielles. Comment estimer la valeur de l’électricité produite via ce procédé ? Comment faire pour que ce marché soit rentable et moins favorable aux producteurs? Quel dispositif de soutien de la filière le gouvernement doit-il adopter ? Egalement, à combien de MW annuel doit se limiter le développement de la filière ? L’objectif est de faire face à une véritable bulle spéculative à laquelle le marché du photovoltaïque doit faire face, victime de son succès. Le 9 mars prochain se terminera la période de suspension d’achat de l’énergie solaire qui a débuté le 2 décembre dernier. Le gouvernement devra ainsi présenter une nouvelle règlementation pour le photovoltaïque à partir du 8 mars prochain.


2011 semble ainsi être une année charnière concernant la gestion de l’énergie en France. Au-delà des débats concernant le gaz de schiste, et, à une autre échelle, la régulation du marché du photovoltaïque, se pose également le problème de la flambée du prix du pétrole dont le cours a atteint la valeur de 106 € ce jour à Londres, favorisée par une intensification des violences en Lybie. Affaire à suivre…



Sources et compléments d’informations :

« Gaz de schistes, toujours plus loin... toujours plus sale ! », Les Amis de la Terre, 21/01/2011
http://www.amisdelaterre.org/Gaz-de-schistes-toujours-plus-loin.html

Application expliquant le processus d’extraction du gaz de schiste – site OWNI :
http://app.owni.fr/gaz/


« Le gaz de schiste vu d’en haut » - Photographie - Usine Nouvelle, 22/02/2011
http://www.usinenouvelle.com/article/le-gaz-de-schiste-vu-d-en-haut.N147012

« Le rapport Charpin-Trink sur le photovoltaïque pose des questions sans prendre position », L’Agefi, 22/02/2011
http://www.agefi.fr/articles/Le-rapport-Charpin-Trink-photovoltaique-pose-questions-prendre-position-1169373.html

« Photovoltaïque : le rapport Charpin-Trink marque la dernière phase de la concertation », Environnement-online.com, 14/02/2011
http://www.environnement-online.com/presse/environnement/actualites/2160/energie-photovoltaique/photovoltaique-le-rapport-charpin-trink-marque-la-derniere-phase-de-la-concertation

lundi 31 janvier 2011

Préconisations « pour une consommation durable »



Face à un système de consommation inadapté au vu des objectifs établis en matière de développement durable, le gouvernement a commandité auprès du Centre d’analyse stratégique (CAS) un rapport permettant de mettre en lumière une série de recommandations pour une consommation plus durable. Après une définition claire de ce qu’est la consommation durable, le rapport met en lumière les obstacles actuels qui empêchent le consommateur d’adopter des comportements plus respectueux de l’environnement et développe ensuite des propositions en termes de politique publique.


La consommation durable est ici définie comme étant un mode de consommation ayant un impact faible sur les écosystèmes, peu émissif de gaz à effet de serre et basé sur un usage limité de ressources naturelles et d’hydrocarbures. Plusieurs constats sont effectués : sur une année, nous consommons actuellement plus de ressources que ce que la Terre peut produire ; selon l’Agence Internationale de l’Energie, la modification de nos modes de consommation est une condition nécessaire pour atteindre les objectifs fixés en termes de gaz à effet de serre. A cela s’ajoute, au-delà de la seule considération environnementale, une inégalité de plus en plus marquée en termes de consommation entre les différents pays du monde (un européen consomme en moyenne 4 fois plus qu’un africain et 2 fois moins qu’un nord-américain) ainsi que le constat d’une absence de corrélation entre le bonheur et l’accumulation de biens matériels.

Consommer de façon plus durable apparaît envisageable à la condition qu’un certain nombre de leviers tant culturels, sociaux, économiques et institutionnels soit levé. C’est dans ce cadre que doivent intervenir les instances publiques afin de mettre en place des solutions concrètes qui soient à la hauteur des enjeux. Le rapport insiste sur la nécessité d’un changement radical des habitudes de consommations basé notamment sur des échanges dématérialisés (location, partage, etc.), sur le recours aux cycles courts (consommation locale) et sur un moindre gaspillage. Il met ainsi en lumière un modèle économique qui ne soit pas principalement motivé par une jouissance matérielle.
Cependant, le rapport ne prône pas une économie basée sur la décroissance : les recommandations et propositions sont formulées de sorte à assurer la prospérité de l’économie française et à ne pas accroître l’actuel endettement de l’Etat. Par contre, il implique et vise un changement structurel des comportements de l’ensemble des parties prenantes.

Voici les propositions telles que formulées au sein du rapport :

- Proposition 1 : « Eduquer à la consommation (durable) dès le plus jeune âge et sensibiliser le consommateur à travers des groupes cibles, à des moments clefs de la vie »

Exemples de moyens proposés : intégration des pratiques de consommation durable dans le système d’éducation ; campagnes d’information et de sensibilisation à travers des relais d’opinion et des médiateurs afin de favoriser une sorte de mimétisme vertueux ; régulation de la profusion des labels ; développer une économie de la fonctionnalité et l’éco-conception en intégrant les coûts globaux des biens et des services.

- Proposition 2 : « Encourager des initiatives pionnières de terrain dans une logique « ascendante » »

Exemples de moyens proposés : soutenir les expérimentations locales en limitant les contraintes financières ; favoriser les échanges de bonnes pratiques.

- Proposition 3 : « Soutenir l’innovation au service de la consommation durable »

Exemples de moyens proposés : investissement en faveur des innovations technologiques et organisationnelles pour un développement durable ; clarifier le statut des associations et entreprises innovantes à vocation sociale et écologique.

- Proposition 4 : « Mettre en place les outils économiques nécessaires »

Exemples de moyens proposés : mise en place d’un signal-prix fort aux produits et services par le biais d’outils tels que les bonus-malus, normalisation, subventions, … ; donner un prix au carbone émis et le faire clairement apparaître aux yeux des consommateurs ; réviser les tarifs de l’eau et de l’électricité pour modifier les comportements des consommateurs ; faire financer les écolabels par les entreprises non-labellisées en s’inspirant du principe pollueur-payeur.

- Proposition 5 : « Encourager l’Etat et les collectivités territoriales à adopter des politiques de consommation et de commande publique durables »

Exemples de moyens proposés : Assurer la cohérence des politiques publiques à l’échelle nationale et impulser une coordination à l’échelle européenne.

- Proposition 6 : « Assurer le suivi pérenne de la politique nationale de consommation durable »

Exemples de moyens proposés : mise en place d’un système de gouvernance en donnant la charge à une entité administrative du suivi de la politique de consommation durable ; identification d’indicateurs de suivi


Un tel rapport n’a d’intérêt que s’il s’accompagne d’un plan d’actions clairement établi et la mise en place d’indicateurs et d’outils de suivi efficaces. Ainsi, le rapport insiste notamment sur l’inefficience du PIB en tant qu’indicateur de bien-être et sur l’importance de l’intégration des externalités sociales et environnementales dans le cadre des évaluations économiques.

Les objectifs de consommation durable sont fixés à horizon 2030 et s’inscrivent dans le prolongement du Pacte écologique et surtout du Grenelle de l’Environnement. Bien que les objectifs s’inscrivent sur le long terme et compte tenu du temps nécessaire à une modification structurelle des modes de consommation, les outils de politique publique doivent être établis et mis en place dès que possible.
Liens et compléments d'informations:
Site Internet du Centre d'analyse stratégique - Rapport "Pour une consommation durable"

http://www.strategie.gouv.fr/article.php3?id_article=1342

mercredi 5 janvier 2011

Fin d’année, le temps des bilans

L’année 2010 se termine ce qui nous amène à l’heure du bilan. L’année 2010 a-t-elle permis d’avancer sur le plan environnemental ? Quels évènements ont marqué cette année ? et quelles sont les perspectives à attendre de l’année 2011 ?


- L’année 2010 : année de la biodiversité

Les Nations Unies ont désigné l’année 2010 comme étant « l’année internationale de la biodiversité ». L’objectif de cette initiative est double : elle vise d’une part à alerter l’opinion publique sur les enjeux et les conséquences relatives à une meilleure prise en compte de la biodiversité dans les perspectives de développement que nous connaissons actuellement ; d’autre part, l’objectif est de favoriser une réflexion globale, aussi bien de la part de l’ensemble des citoyens que des organisations internationales et des gouvernements, afin de proposer des solutions concrètes pour préserver la biodiversité en déclin. Ces objectifs ont-ils finalement été atteints ? Dans une certaine mesure, ils l’ont été, car cette initiative s’est soldée par l’organisation de plus de 2 800 évènements en France sur cette thématique. La biodiversité demeure de moins en moins une notion abstraite pour devenir une réalité aux yeux des citoyens.

Plus encore, plusieurs évènements internationaux ont été le fruit d’une réflexion internationale entre les différents gouvernements du monde. Ainsi, en octobre 2010 s’est tenue la Conférence des Nations Unies sur la diversité biologique à Nagoya (Japon) correspondant à la COP10, c’est-à-dire la dixième conférence des Parties de la Convention sur la Diversité Biologique des Nations Unies, née du Protocole de Kyoto de 1992. Ce sont en tout 193 pays qui se sont réunis afin de discuter des enjeux et des objectifs communs en termes de biodiversité. Cette conférence a permis d’avancer sur plusieurs points : les différents pays, via la mise en place d’un plan stratégique 2011-2020 mettant en avant 20 objectifs réalistes en vue de préserver la biodiversité, ont notamment pris des engagements en faveur d’une pêche durable (10% des aires maritimes protégées, objectif qui demeure cependant trop faible pour les ONG telles que Greenpeace et WWF), de la lutte contre la déforestation et en faveur de la préservation des aires protégées terrestres et des zones humides intérieures (objectif de 17% pour 2012, sachant que le niveau actuel est de 12%). La conférence a également donné lieu à l’adoption d’un protocole APA (Accès aux ressources et partage des avantages). Enfin, la Conférence de Nagoya a également été l’occasion pour les pays présents de prendre des engagements en vue de financer ces différents objectifs. Ainsi la France devrait engager 10% de l’aide publique au développement pour la préservation de la biodiversité dans les pays en développement. Ce taux augmentera progressivement afin d’atteindre un investissement total de 4 milliards d’euros d’ici 2020.

Plus récemment, le Sommet de Cancun (COP16) s’est déroulé dans la plus grande discrétion, notamment marqué par l’absence des principaux chefs d’Etat. Au cœur de ce sommet international, le sujet de la lutte contre le changement climatique. C’est ainsi tout naturellement qu’il place la biodiversité et la lutte contre la déforestation au cœur de ses préoccupations. Mais le sommet de Cancun n’a pas été à la hauteur des espérances d’une part du fait qu’il n’ait pas permis la signature d’accords véritablement engageants et d’autre part du fait que certains mécanismes tels que le Redd + restent non opérationnels. Cette année, le prochain sommet sur l’adaptation au changement climatique aura lieu à Durban en Afrique du Sud.

Enfin, pour clôturer l’année de la biodiversité, l’ONU a donné son accord pour la création de l’IPBES (Plateforme intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversité et les services écosystémiques), qualifiée comme étant le GIEC de la biodiversité. Cette structure fera ainsi office d’interface entre les scientifiques et les décideurs politiques. Ce sera lors de la prochaine réunion du Conseil d’administration du programme des Nations Unies de Nairobi (Kenya) en février 2011 que les différents ministres en charge de l’environnement décideront de la date de la première réunion de l’IPBES, normalement prévue pour juin 2011.

Ainsi se clôture l’année de la biodiversité. L’année de 2011 a été proclamée Année Internationale de la Forêt par l’Assemblée Générale des Nations Unies.


- 2010 : politique et environnement

L’année 2010 a également été marquée par la loi Grenelle 2, promulguée le 12 juillet, faisant suite à la loi Grenelle 1 du 3 août 2009. Le Grenelle de l’environnement se caractérise ainsi par près de 450 articles de loi et 70 dispositions fiscales visant à réduire l’impact environnemental de la France. Ainsi, le Grenelle 2 a permis de compléter les premiers textes figurant dans la loi Grenelle 1 sur six chantiers majeurs : Bâtiments/urbanisme, transports, énergie, biodiversité, Risques/Santé/déchets, et gouvernance. Mais si le gouvernement se félicite des résultats obtenus, notamment en ce qui concerne le sujet des énergies, via la publication de son bilan annuel, certaines associations et ONG environnementales pointent du doigt cette initiative qualifiée d’opération d’autopromotion et proposent la mise en place d’un contre-bilan. WWF devrait ainsi proposer un bilan des actions du Grenelle de l’environnement en février prochain.

Au-delà des engagements pris dans le cadre de la loi Grenelle 2, quelle place accorde-t-on véritablement à l’environnement au sein de la politique française ? L’environnement constitue-t-il une vitrine pour un gouvernement qui cherche à plaire à son électorat ou s’agit-il d’un véritable sujet de fond ? Ainsi, si le président place l’environnement au cœur des discussions lors des réunions internationales, il n’hésite pas à proclamer auprès des agriculteurs que l’environnement « ça commence à bien faire »… Plusieurs évènements ont marqué le volet « environnement » durant l’année 2010. On peut notamment citer le remaniement politique qui s’est concrétisé non pas par un changement de premier ministre mais par une modification de la constitution du MEEDDM. Le départ volontaire de J-L Borloo a placé N Kosciusko-Morizet à la tête du ministère de l’écologie, du développement durable, des transports et du logement. Si le volet énergétique reste au cœur du ministère, les dossiers relatifs aux grandes infrastructures énergétiques, dont le nucléaire, appartiennent au ministère de l’industrie, de l’énergie et de l’économie numérique. Concernant la thématique de la mer, le ministère de l’environnement garde la main sur la stratégie globale hormis la politique de la pêche concernant ministère de l’agriculture.

Aussi, l’actualité a été marquée par l’adoption du projet de loi de finance 2011 faisant apparaître quelques changements sur la thématique environnementale. En effet, victimes de leur succès, les installations permettant d’effectuer des économies d’énergies sont soumises à une baisse de crédit d’impôt. Ainsi, par exemple, le crédit d’impôt pour l’installation de panneaux solaires photovoltaïques est abaissé de 50% à 25%. La loi de finance prévoit notamment une légère modification dans l’attribution des primes pour les véhicules moins polluants, la création d’un nouveau PTZ (prêt à taux zéro) ou bien une révision à la baisse de la prime prévue en faveur des agro-carburants compte tenu de leurs effets contestés sur l’environnement.

Enfin, 2010 a été marquée par le débat autour de la taxe carbone. Pour rappel, il s’agit d’une taxe environnementale visant à orienter les comportements des agents économiques vers la consommation de biens et services moins émissifs en termes de gaz à effet de serre. L’idée d’une mise en application d’une taxe carbone, ou contribution climat-énergie, a été abandonnée en mars dernier par le gouvernement, celui-ci craignant une baisse de la compétitivité des entreprises de l’hexagone. Le débat a ainsi été reporté au niveau européen. Celle-ci reviendra-t-elle au cœur de l’actualité courant 2011 ? Et à l’approche des élections de 2012, le gouvernement pourrait-il se permettre de faire marche arrière sur la mise en place de cette contribution fiscale ?

- Du côté des entreprises

Les entreprises aussi ont été concernées par la problématique environnementale durant cette année 2010. On peut notamment citer la création d’une nouvelle norme visant à apporter des outils d’un management plus responsable aux entreprises: il s’agit de la norme ISO 26 000. Cette norme dont l’élaboration a nécessité l’implication de 500 experts de 99 pays identifie sept principaux enjeux : les droits de l'Homme, les conditions de travail, l'environnement, les bonnes pratiques des affaires, les consommateurs, la contribution au développement local et la gouvernance de l'organisation qui s'applique aux six autres. Cet outil n’a pas de caractère obligatoire mais permet d’accompagner les entreprises à leur stratégie économique, sociale et environnementale. Il s’agit en outre de fournir un outil applicable au niveau international. Ce type de norme est nécessaire non seulement pour aider les entreprises à modifier leur comportement notamment en évaluant leur impact sur l’ensemble des parties prenantes mais aussi pour favoriser plus de transparence.

Par ailleurs, en ce mois de décembre, pour la quatrième année consécutive, l’ADEME et l’ARPP ont publié les résultats de leur bilan intitulé « Publicité et Environnement ». Globalement, le taux de conformité reste relativement satisfaisant (88%) et stable (en 2009, ce taux était évalué à 90%) malgré le durcissement des règles introduites par la nouvelle « Réglementation Développement Durable » de l’ARPP.

Cette liste d’évènements n’est bien sûre pas exhaustive. D’autres évènements, plus ou moins médiatisés, ont permis d’avancer d’un point de vue environnemental ou ont tout simplement permis de créer de véritables débats : on peut notamment citer le cas des boues rouges en Hongrie qui interroge sur la gestion des risques sur les sites industriels ; la tempête Xynthia qui a créé le débat sur l’aménagement urbain en zones inondables ; ou, enfin, les débats autour des agro-carburants, de la surpêche et des algues vertes. Des débats toujours actuels qui devraient de nouveau rythmer l’actualité sur 2011.



mardi 7 décembre 2010

Lutte contre la déforestation : l’affaire de tous




A la veille de Noël où le sapin est mis à l’honneur, l’ADEME prodigue quelques conseils pour verdir ces fêtes de fin d’année. Chaque année, ce sont près de six millions de sapins qui intègrent les salons des Français. Parmi ce chiffre, ce sont 5 millions de sapins naturels dont 80% sont issus d’exploitations françaises. Les sapins naturels restent selon l’ADEME la solution à privilégier, les sapins en plastique ou en métal, même s’ils sont réutilisables chaque année, étant fabriqués à l’autre bout du monde en des matériaux non recyclés. Mais si le sapin reste à l’honneur durant ces fêtes de noël, ce n’est pourtant pas cet arbre qui est au cœur des discussions. En effet, le Sommet de Cancun réunit l’ensemble des Etats pour traiter des enjeux liés au climat parmi lesquels se trouve l’enjeu de la déforestation. Parmi les principales causes de la déforestation, ce ne sont évidemment pas les sapins de noël mais la culture de l’huile de palme. Considérant la croissance de la production d’huile de palme, notre « beau sapin » pourrait bien se voir détrôner par le palmier. Retour sur l’actualité relative à la déforestation.

Si le Sommet de Nagoya a permis de prendre des engagements au niveau international sur la protection des forêts, le président brésilien est relativement pessimiste en ce qui concerne le Sommet de Cancun. Il regrette notamment l’absence des chefs d’Etat des principaux pays concernés par le réchauffement climatique, sans qui aucun véritable engagement ne peut être décidé, ainsi que le manque d’empressement de leur part à financer la lutte contre la déforestation. Le président Luiz Inacio da Silva place la lutte contre la déforestation parmi ses priorités et s’est engagé à réduire de 39% ses émissions de GES et à réduire la déforestation de 80% d’ici 2020. La déforestation est la cause de 20% des émissions mondiales de CO2, plaçant ainsi le Brésil en 4e position parmi les principaux pays émetteurs de gaz à effet de serre.
Le Sommet de Cancun est en outre l’occasion pour les pays du Sud d’avancer sur le processus du REDD+ qui leur permettrait de combattre la déforestation et de s’adapter aux conséquences du changement climatique grâce à la constitution d’un fonds de 30 milliards de dollars d’ici à 2012. Plusieurs sources de financement sont à l’étude parmi lesquelles la mise en place d’un fonds multilatéral ou d’un système basé sur le marché du carbone. Le financement par le recours au marché carbone reste cependant vivement critiqué par certaines ONG telles que Friends of the Earth : cette dernière craint que les pays industrialisés privilégient la compensation à la réduction des émissions de carbone et redoute une dévalorisation du prix du carbone qui irait en faveur des industries dépassant leurs quotas. Enfin, elle craint une privatisation des ressources naturelles par les pays du Nord aux dépens des populations locales qui ne profiteraient pas des profits générés par le programme de reforestation.

Mais ce programme de reforestation semble selon Greenpeace être mis à mal par le lobby des industries d’huile de palme. En effet, les producteurs d’huile de palme et de pâte à papier ont prévu de tripler leur production d’ici à 2020, un objectif qui pourrait être menacé par les projets du REDD. Greenpeace a ainsi révélé dans l’un de ses rapports dénommés « REDD Alert » que les industriels prévoiraient de jouer sur les ambiguïtés existantes dans certaines définitions : ainsi, les productions d’huile de palme entreraient dans le cadre de la réhabilitation des forêts en terres dégradées et pourraient dès lors bénéficier des fonds prévus à la reforestation. Rappelons-le, l’Indonésie fait partie des pays les plus touchés par la déforestation, une catastrophe environnementale qui fait la fortune de certains : les 40 hommes les plus riches de l’archipel doivent leur fortune aux exploitations des mines de charbon et d’huile de palme.

La lutte contre la déforestation constitue depuis longtemps l’une des priorités des ONG environnementales. Elles ont notamment pour objectif d’alerter l’opinion sur les origines de la déforestation parmi lesquelles, les cultures d’huile de palme par les industriels. Cette huile bon marché, plus connue sur les étiquettes sous le nom « d’huile végétale » se retrouve en effet dans de nombreux produits de consommation courante. Ainsi, Greenpeace a dénoncé ces pratiques industrielles en prenant pour cible l’un des géants de l’alimentaire, Nestlé : on se souvient ainsi d’une vidéo diffusée sur Internet qui montrait un employé d’entreprise mangeant des doigts d’orang-outan soigneusement emballé dans un sachet Kitkat. Le buzz a fonctionné, Nestlé ayant depuis renoncé à acheter de l’huile de palme. De la même façon, d’autres entreprises ont également cessé à utiliser cette huile végétale parmi lesquelles le groupe Findus, Burger King ainsi que le distributeur Casino en mars dernier. Le groupe Ferrero quant à lui refuse de se passer de cette huile, indispensable à la conception de ses produits alimentaires. Cependant, Ferrero a d’ores et déjà exclu l’achat d’huile de palme issue d’Indonésie et s’est engagé à s’approvisionner petit à petit en huile de palme certifiée durable par le « Roundtable on Sustainable Palm Oil » (RSPO) créé par le WWF.

L’engagement des entreprises ne se limite pas à l’utilisation de l’huile de palme. En effet, on peut notamment citer l’exemple de Castorama qui s’est vu récompensé par le FSC International pour son implication relative à la certification et la promotion de ce label. Cette récompense est certainement le fruit d’un partenariat actif avec WWF qui l’accompagne dans l’élaboration de sa stratégie Bois.

Par ailleurs, le 30 juin dernier, la Caisse des dépôts et consignations (CDC) a présenté le Club Carbone forêt-bois dont l’objectif est de valoriser le carbone stocké dans les forêts françaises et les produits à base de bois. Ce club a pour objectif de réunir l’ensemble des acteurs français, publics et privés, souhaitant réduire les émissions de gaz à effet de serre (GES) par le biais des forêts françaises : pouvoirs publics, acteurs financiers, les gestionnaires des forêts, et, notamment, les entreprises souhaitant compenser leurs émissions de GES via des projets forêt-bois au niveau national. Ainsi, on peut notamment citer comme intervenants, la CDC Climat, l’Office National des Forêts (ONF et ONF International), le FCBA, l’ASFFOR, etc.


Le sommet de Cancun, qui prendra fin le 10 décembre prochain, est par ailleurs l’occasion pour France 5 de diffuser le documentaire de Patrick Rouxel dénommé « Green » qui, à travers l’histoire d’un orang-outan alerte l’opinion sur les conséquences liées à la déforestation. La lutte contre la déforestation est en effet l’affaire de tous : elle concerne aussi bien les Etats qui doivent financer les projets de reforestation ; les entreprises par le biais, notamment, de leurs politiques d’achats ; les ONG environnementales qui, notamment, dénoncent les dérives relatives à la gestion du bois ; et enfin des consommateurs via des comportements d’achats responsables.


Sources et compléments d’informations :

Le Monde, « La conférence de Cancun sur le climat "ne va rien donner", estime Lula » (01/12/2010)
http://www.lemonde.fr/planete/article/2010/12/01/la-conference-de-cancun-sur-le-climat-ne-va-rien-donner-estime-lula_1447688_3244.html

20 Minutes, « Sommet de Cancun: d'abord pour lutter contre la déforestation » (29/11/2010)
http://www.20minutes.fr/article/630777/planete-sommet-cancun-abord-lutter-contre-deforestation#xtor=RSS-148
Courrier International, « De l'huile qui fait des milliardaires » (06/12/2010)
http://www.courrierinternational.com/breve/2010/12/06/de-l-huile-qui-fait-des-milliardaires

Greenpeace, « L’accord historique de protection de la forêt indonésienne mis en péril par l’industrie » (23/11/2010)
http://forets.greenpeace.fr/laccord-historique-de-protection-de-la-foret-indonesienne-mis-en-peril-par-lindustrie

Vidéo Youtube, « Greenpeace dénonce Nestlé, qui contribue à la déforestation en Indonésie »
http://www.youtube.com/watch?v=hgcHTHGu5tA

Actu-Environnement, « La CDC lance le Club carbone forêt-bois pour valoriser la séquestration du CO2 par la filière forestière » (01/07/2010)
http://www.actu-environnement.com/ae/news/cdc-bois-fond-sequestration-10592.php4

Sciences et Avenir, « Mon beau sapin... végétal ou artificiel pour ce Noël ? » (02/12/2010)
http://www.sciencesetavenir.fr/depeche/nature-environnement/20101130.AFP6560/mon-beau-sapin-vegetal-ou-artificiel-pour-ce-noel.html

WWF, « Castorama récompensé par le FSC International pour la promotion faite de ce label » (25/10/2010)
http://www.wwf.fr/partenariats-entreprises/actualites-de-nos-partenariats/castorama-recompense-par-le-fsc-international-pour-la-promotion-faite-de-ce-label

lundi 29 novembre 2010

Climat: la Chine projette la mise en place d'un marché de quotas

Mercredi 24 novembre, l’Organisation Météorologique Mondiale a affirmé que les gaz à effet de serre ont atteint un niveau record en 2009 depuis l’époque pré-industrielle. Ainsi, malgré la crise, les niveaux de CO2 et de méthane sont alarmants. Par ailleurs, la Chine occupe la première place mondiale en volume d’émissions. Si ce fait est clairement reconnu par l’Agence Internationale de l’Energie (AIE), la Chine avait cependant du mal à le confirmer, souhaitant que le mode de calcul soit ramené au nombre d’habitants. Pourtant, c’est bien ce qu’a affirmé le négociateur en chef chinois sur les questions climatiques, même si ses dires ont été soumis à la censure dans la transcription officielle de la conférence de presse. Ainsi, consciente de son rôle face aux enjeux liés aux émissions de gaz à effet de serre, la Chine intervient en mettant en place une politique plus stricte en faveur du climat. Alors que le sommet de Cancun est en cours, il paraît intéressant de revenir sur l’un des instruments permettant de limiter les rejets de GES : les marchés de quotas de CO2.


La Chine projette de mettre en place un marché de quotas d’émissions de Gaz à Effet de Serre (GES) dans le cadre de son douzième plan quinquennal (2011-2015). Le plan quinquennal 2006-2010 prévoyait déjà des mesures visant à améliorer le bilan énergétique du pays basées sur des outils réglementaires et administratifs. L’objectif affiché était une réduction de l’intensité énergétique du PIB de 20%. Le marché des quotas se substituerait ainsi à cette approche plus étatique afin d’adopter une démarche qui se voudrait plus libérale. Le nouveau projet quinquennal qui présente le marché de quotas comme une alternative envisageable a ainsi été présenté par le Comité Central du Parti communiste chinois fin octobre et devra être validé début 2011. Ce nouvel outil permettrait ainsi à la Chine de répondre à ses engagements volontaires pris lors du sommet de Copenhague consistant à réduire de 40% à 45% ses émissions de carbone par unité de PIB d’ici à 2020 par rapport à 2005. Il ne reste plus qu’à se décider sur les modalités de mise en œuvre de ce marché. Plusieurs éléments sont encore à déterminer : à quelle échelle ce marché s’étendra-t-il dans un premier temps ? Quels seront les secteurs d’activités concernés par cette obligation ? Et enfin, quelles seront les modalités de mise en place (système d’échanges de quotas ou plafond d’émissions) ? Pour répondre à l’ensemble de ces questions, la Chine n’a pas hésité à faire appel à l’expertise européenne en juillet et en novembre, une troisième rencontre étant planifiée également en décembre. Cet intérêt de la Chine pour le système de quotas d’émissions est une bonne nouvelle pour l’Union Européenne qui souhaite la mise en place d’un marché global intégrant les principaux émetteurs de CO2.

Afin de répondre aux objectifs fixés dans le cadre du protocole de Kyoto (c’est-à-dire une réduction de 8% des GES entre 2008 et 2012, sur la base du niveau de 1990), une directive européenne concernant le marché d’échange de quotas d’émissions de CO2 a été établie dès janvier 2005. Ainsi, l’ensemble des Etats concernés ont eu la responsabilité de répartir des quotas d’émissions parmi les six secteurs industriels les plus émissifs de gaz à effet de serre (production d’énergie, ciment, verre, métaux ferreux, industries minérales, pâtes à papier – les secteurs tels que celui des transports responsable de 25% des émissions de GES ou du bâtiment ne sont pas concernés). Ainsi, chaque année, un Plan National d’Allocations des Quotas (PNAQ) présenté par chaque pays de l’UE et ratifié par la Commission européenne détermine la répartition de ces quotas entre les différents secteurs. Ces quotas sont ensuite échangeables entre les industriels sur un marché qui se caractérise par un système de bourses électroniques centralisées.

Une nouvelle décision vient modifier le fonctionnement de ce marché d’échanges de quotas. En effet, en novembre 2010, les sénateurs, se basant sur le code de l’environnement et sur la loi de finances rectificative de 2008, ont affirmé leur volonté de voir modifier deux éléments : d’une part, dès 2011, la France fera payer aux industriels 5 à 15% des quotas alloués en 2011 et 2012 (les quotas étaient jusqu’alors délivrés gratuitement). Le prix des quotas correspondra au prix moyen constaté sur les 12 derniers mois sur le marché d’échange de quotas. Seulement une partie des industriels serait concernée par ces quotas payants. Par ailleurs, dans le cadre du PNAQ, la France a mal évalué les prospectives concernant les nouveaux entrants. Ainsi, la réserve française est estimée à 2,74 millions de tonnes de CO2 lorsque le besoin réel s’évalue à hauteur de 9 millions de tonnes de CO2. Les nouveaux entrants seront ainsi contraints d’acheter des quotas sur le marché et ne profiteraient pas comme leurs concurrents de quotas gratuits ce qui créerait des distorsions de concurrence. La mise en place de quotas payant par la France permettrait de rééquilibrer le marché ; D’autre part, les industriels ayant diminué leur activité n’obtiendront pas la totalité des quotas prévus initialement. En effet, les sénateurs estiment que l’allocation des quotas échangeables doit être cohérente : ainsi, si l’activité a diminué de plus de 25% depuis 2007, le nombre de quotas doit être revu à la baisse pour éviter tout effet d’aubaine notamment dû à la revente du surplus de quotas sur le marché.


Le Sommet de Cancun sera en outre déterminant dans la lutte contre le changement climatique. En effet, le marché des quotas ne représente qu’un outil qui pourrait s’avérer peu efficace sans un engagement multilatéral des différents Etats. La Chine y sera notamment présente. Si elle a reconnue sa responsabilité vis-à-vis des questions liées au Climat, elle souhaite que les pays dits développés assument leurs responsabilités (ce qui n’est pas sans viser en particulier les Etats-Unis). La Chine, qui devient notamment le leader mondial de production d’énergies renouvelables, est un acteur qui semble apte à prendre des engagements sérieux. Ce ne sera que le 10 décembre, à la fin du Sommet mondial de Cancun que l’on pourra ou non confirmer ce vent d’optimisme… En effet, rappelons-le, si le marché des quotas est une solution, elle n’en demeure pas moins la solution en faveur du climat.


Sources et compléments d'information:

Actu Environnement, « PLF 2011 : les sénateurs durcissent l'attribution des quotas de CO2 » (25/11/2010)
http://www.actu-environnement.com/ae/news/senat-quotas-payants-CO2-plf-11437.php4

Actu Environnement, « Conférence de Cancún sur le climat : quels enjeux ? » (29/11/2010)
http://www.actu-environnement.com/ae/news/conference-climat-cancun-enjeux-11446.php4

Actu Environnement, « La Chine sur le point de créer un marché d'échange de quotas de CO2 » (18/11/2010)
http://www.actu-environnement.com/ae/news/chine-marche-carbone-co2-europe-ets-11382.php4

Le Monde, « La Chine admet être le 1er émetteur mondial de gaz à effet de serre », (23/11/2010)
http://www.lemonde.fr/planete/article/2010/11/23/la-chine-admet-etre-le-1er-emetteur-mondial-de-gaz-a-effet-de-serre_1443801_3244.html

Le Monde, « Les gaz à effet de serre ont atteint des niveaux records en 2009 » (24/11/2010)
http://www.lemonde.fr/planete/article/2010/11/24/les-gaz-a-effet-de-serre-ont-atteint-des-niveaux-records-en-2009_1444498_3244.html

Le Journal Développement Durable, « Climat : La Chine prépare son marché du carbone » (22/11/2010)
http://www.developpementdurablelejournal.com/spip.php?article7186

« Guide Pratique du marché des quotas d’émissions de CO2 », Ministère de l’Ecologie et du Développement Durable, ADEME, 2005
http://www.developpement-durable.gouv.fr/IMG/ecologie/pdf/guide_quotas_final.pdf

mardi 16 novembre 2010

Energies fossiles: une question de subventions



Le prix Pinocchio 2010 du développement durable a été décerné à… Somdiaa, Eramet et le Crédit Agricole ! Trois entreprises se sont en effet vues décerner ce prix pour le moins peu prestigieux par les Amis de la Terre suite à un vote auprès de 6000 internautes. Ainsi, le Crédit Agricole, à l’origine dénommée la banque verte car reconnue comme étant « la banque des agriculteurs » semblent jouer sur les mots : « It’s time for Green Banking » arbore-t-elle dans l’une de ses campagnes de communication. Une publicité qui n’est pas du goût des Amis de la Terre qui les accusent de greenwashing : par le biais de cette publicité, le Crédit Agricole se place comme étant un acteur de la croissance verte alors que la banque française est à l’origine d’investissements massifs en faveur de projets de développement des énergies fossiles tels que la centrale à charbon de Medupi en Afrique du Sud qui a soulevé la polémique. A l’heure où l’épuisement des énergies fossiles et les impacts qu’elles génèrent figurent parmi les grandes urgences environnementales, le Crédit Agricole ne peut ainsi décemment se définir comme une entreprise verte. Qu’en est-il de la part des Etats ? Le Crédit Agricole ne semble pas être le seul à être pointé du doigt. Alors que le G20 s’est réuni à Séoul ces 11 et 12 novembre, la question des énergies fossiles a donné lieu à des rapports et comptes-rendus préalables permettant un véritable état des lieux de la situation mondiale.


Les représentants du G20 semblaient s’accorder : il faut stopper les subventions inefficaces aux énergies fossiles (encore faut-il pouvoir définir ce qu’est une « subvention inefficace »…). Cette déclaration a été faite à Pittsburg en septembre 2009, puis réaffirmée lors du sommet de Toronto de juin 2010. Pourtant, selon l’Agence Internationale à l’Energie (AIE), de nombreuses subventions en faveur des énergies fossiles sont encore établies (environ 312 milliards de dollars en 2009) ce qui n’est pas sans conséquences : gaspillage, volatilité des prix, contexte anticoncurrentiel vis-à-vis des énergies renouvelables… Ainsi, selon le rapport World Energy Outlook 2010 (WEO 2010) rédigé par l’AIE, la suppression de ces subventions pourrait permettre une réduction de 5,8 % des émissions de CO2 (soit 2 milliards de tonnes) à horizon 2020 et permettrait de réorienter les investissements en faveur des énergies renouvelables. Un avis partagé par le rapport du Groupe Consultatif de haut niveau qui a évalué à 8 milliards de dollars l’investissement qui pourrait de fait être établi tous les ans par les pays industrialisés en faveur de la lutte contre les changements climatiques dans les pays du sud qui, rappelons-le sont les premiers à être impactés par les effets qu’ils génèrent. Cependant, selon les ONG Oil Change International et Earth Track, les engagements pris par le G20 pour stopper les subventions inefficaces n’ont pas donné lieu à des mesures concrètes. Des discussions n’en sont jusqu’alors ressorties que des inactions. En effet, un rapport publié début novembre liste les « exclusions », c’est-à-dire les subventions qui ne sont pas concernées par cet engagement : parmi elles, les subventions pour les énergies fossiles qui sont moins carbonées que d’autres, celles qui permettent un développement rural et la création d’emplois ou bien celles qui sont « déguisées » en avantages fiscaux. De plus, l’ONG Les Amis de la Terre souligne l’oubli concernant les soutiens publics à l’industrie fossile effectués, notamment, via la Banque Mondiale. Un détail qui n’est pas sans rappeler la vidéo de Greenpeace intitulée « où va mon argent ? »…

Ainsi, Les Amis de la Terre ont demandé à la Banque Mondiale de cesser les prêts ou garanties en faveur des énergies fossiles et de les réorienter vers le secteur des énergies renouvelables. 63% des prêts issus de la Banque Mondiale pour l’énergie sont dédiés aux combustibles fossiles (la part dédiée au charbon a même augmenté entre 2007 et 2008). En outre, l’ONG Oil Change International, dans son rapport « Energy for the poor ? » a démontré qu’aucuns des prêts dédiés aux énergies fossiles émanant de la Banque Mondiale sur les années fiscales 2009 et 2010 n’étaient directement destinés à favoriser l’accès à l’énergie pour les plus pauvres.

Si les énergies fossiles s’épuisent peu à peu, une question se pose alors : à quand l’apparition des alternatives au pétrole ? L’Université de Californie s’est posée la question et est parvenue à une réponse plutôt déconcertante au vue de l’urgence de la situation : selon cette étude publiée dans la revue « Science & Technology », il faudrait attendre près de 90 ans avant de voir apparaître les technologies de remplacement au pétrole. La méthode se base sur les marchés boursiers et les prédictions des investisseurs concernant la période de maturité des nouvelles technologies. La date est ainsi évaluée en fonction de la capitalisation boursière basée sur les actions et dividendes émanant des industries pétrolières publiques et des sociétés d’énergies alternatives. Cette méthode, bien que basée sur des données purement mercantiles, a déjà fait ses preuves dans de nombreuses prédictions. Face à ces résultats, on est amené à penser qu’une intervention rapide et efficace de la part des principaux Etats est d’autant plus nécessaire afin de favoriser plus rapidement des énergies alternatives.


L’humanité aura épuisé en près de 200 ans les réserves accumulées sur plusieurs centaines de millions d’années. Au vue des enjeux, la question de la gestion des énergies fossiles (qu’il s’agisse de l’exploitation, de la consommation de ces énergies, de la recherche d’alternatives ou bien sûr des subventions attribuées à ce secteur) constitue une véritable urgence. Pourtant, le sujet des énergies fossiles n’a pas été abordé lors du G20 de Séoul. Un « oubli » qui ne présage rien de réellement positif à l’approche du prochain sommet des Nations Unies sur le réchauffement climatique qui aura lieu à Cancun du 29 novembre au 10 décembre 2010…


Sources et compléments d’information :

Le Monde, « Prix Pinocchio : Les Amis de la Terre décernent les bonnets d'âne du développement durable » (09/11/2010)
http://www.lemonde.fr/planete/article/2010/11/09/prix-pinocchio-les-amis-de-la-terre-decernent-les-bonnets-d-ane-du-developpement-durable_1437842_3244.html

Actu Environnement « G20 : la suppression des subventions aux énergies fossiles reste à confirmer » (10/11/2010)
http://www.actu-environnement.com/ae/news/g20-seoul-subventions-energies-fossiles-11339.php4

Développement Durable Le Journal, « Énergies fossiles : Ces subventions qui endettent le Climat » (15/11/2010)
http://www.developpementdurablelejournal.com/spip.php?article7164

Actualité News Environnement, « Energie fossiles et prêts de la Banque mondiale » (08/10/2010)
http://www.actualites-news-environnement.com/24262-Energie-fossiles-prets-Banque-Mondiale.html

Enerzine, « Les substituts au pétrole : pas avant 90 ans ! » (10/11/2010)
http://www.enerzine.com/10/10754+les-substituts-au-petrole---pas-avant-90-ans+.html

lundi 8 novembre 2010

Actualités sur le nucléaire en Europe

Le convoi radioactif France - Allemagne

Après un voyage de trois jours, le « convoi le plus radioactif du monde » tel que qualifié par l’ONG Greenpeace, est arrivé en gare de Dannenberg en Allemagne ce lundi 8 novembre. Ce convoi, qui a quitté la gare de Valognes (Normandie) vendredi dernier, contenait un total de 11 « Castor » (Cask for storage and transport of radioactive material), eux-même constitués de 28 « Canisters » (conteners composés de déchets vitrifiés). Plus concrètement et selon les données de l’Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs, c’est au total une radioactivité de 3 000 PBq (Peta Becquerel) qui a été acheminée vers l’Allemagne, soit 10 fois plus que la radioactivité dégagée par la catastrophe de Tchernobyl. Greenpeace a ainsi mobilisé de grands moyens contre ce convoi, d’une part en incitant les citoyens à intervenir par le biais de manifestations ou d’opérations de blocage pacifiques ; et d’autre part en portant plainte contre Areva pour ne pas avoir respecté les contraintes de sécurité pourtant indispensables pour ce type de convoi. En effet, les déchets radioactifs auraient été entreposés en gare de Valognes en date du 25 octobre, pour un départ prévu 10 jours plus tard, dans une Installation Nucléaire de Base (INB) non déclarée (les INB doivent être autorisées par décret par l’Autorité de Sureté Nucléaire et soumises à enquêtes publiques). Le trajet prévu pour le convoi a ainsi été interrompu à diverses reprises par plusieurs dizaines de milliers de manifestants d’abord en France, puis en Allemagne, destination finale des déchets nucléaires. Et, en Allemagne tout comme en France, les déchets radioactifs seront entreposés dans un lieu inadapté pour le stockage de déchets dangereux, c’est-à-dire dans un hangar de Gorleben. Sylvain Trottier de Greenpeace a ainsi dénoncé l’impasse dans laquelle l’on se trouve : « Il n’existe aucune solution viable pour les déchets nucléaires. Personne n’en veut et personne ne sait quoi en faire ».

Commission européenne : enterrer les déchets nucléaires pour mieux les gérer

Ce constat a également été fait par la Commission européenne qui a présenté de fait le 3 novembre dernier un projet de directive sur la gestion des déchets nucléaires basé sur le stockage en profondeur. Chaque année, ce sont près de 7000 m3 de combustibles usés issus des 147 centrales nucléaires d’Europe qui sont stockés dans des entrepôts ou installations provisoires. Il n’existe actuellement pas d’installations de stockage définitif. La Commission, avec l’appui d’experts scientifiques et techniques, a ainsi fait le choix des installations de stockage souterraines. La directive est prévue pour 2011. Les Etats membres auront alors un délai de 4 ans afin de mettre en place un programme national allant en ce sens. Les pays détenant peu de centrales, ce qui n’est pas le cas de la France, auront la possibilité de mutualiser la gestion des installations de stockage. Heureusement, la directive interdit la création d’installations de stockage dans des pays tiers. Par ailleurs, bien que la Commission souhaite que la population soit informée et qu’elle intervienne dans les décisions relatives à la gestion de ces déchets nucléaires, le Réseau Sortir du Nucléaire dénonce « une orientation dangereuse et antidémocratique » dans le sens où le projet de directive a été élaboré sans réelle consultation de la population.

Action de la population face au nucléaire ?

Mais que peut faire la population lorsqu’elle s’oppose au nucléaire ? Des associations et ONG telles que Greenpeace tentent d’orienter la population afin de faire entendre sa voix. Ainsi Greenpeace intervient au nom de la société civile en portant plainte contre Areva, organise des actions de mobilisation d’ordre pacifique, notamment pour ralentir les convois de déchets nucléaires,… Greenpeace se donne également pour rôle d’informer la population. Ainsi, l’ONG a été à l’initiative d’une vidéo qui se veut synthétique et pédagogue afin d’expliquer le rôle des banques vis-à-vis des activités nucléaires, en pointant notamment du doigt la BNP Paribas, principal financeur de ce type de projets. L’argent des épargnants est en effet réinvesti dans divers projets : dans des projets publics, des activités spéculatives mais également dans des projets privés tels que l’extraction de pétrole ou les activités nucléaires (dont la centrale Angra 3 au Brésil conçue à partir d’une technologie considérée comme obsolète datant de plus de 30 ans), ces derniers étant la plupart du temps soutenus par des garanties d’Etat. La vidéo est visible sur le site : http://ouvavotreargent.com/

Le nucléaire en Europe : zoom sur l’Italie, l’Allemagne et la France

Par ailleurs, ce début de mois a également été marqué par la création en Italie d’une nouvelle agence de sûreté nucléaire. La création de cette nouvelle agence entre dans le cadre de la stratégie énergétique nationale qui vise à développer l’activité nucléaire de l’Italie, en collaboration notamment avec EDF - EDF participera également à la construction d’un réacteur nucléaire aux Pays-Bas, en partenariat avec Delta.

En Allemagne, le convoi de déchets radioactifs intervient une semaine après l’autorisation par les députés d’allonger la durée de vie des réacteurs nucléaires en dépit de son engagement de limiter leur activité à horizon 2020. Cependant, malgré les progrès établis par l’Allemagne dans le cadre des énergies renouvelables, l’allongement de la durée de vie des réacteurs était, semble-t-il, la seule solution alternative au charbon dont l’Allemagne dépend encore beaucoup.

En France, le nucléaire représente un véritable business, et pas seulement en faveur de BNP Paribas. En effet, la visite du président chinois Hu Jintao à l’Elysée a été l’occasion de signer une série de contrats d’une valeur totale de 16 milliards d’euros. Ainsi, Areva a conclu un contrat avec le producteur d’électricité chinois pour la construction d’une usine de retraitement du combustible nucléaire et la fourniture de 20 000 tonnes d’uranium sur 10 ans et a négocié la livraison de deux réacteurs de type EPR ce qui, malheureusement pour Areva, n’a pas aboutit sur un contrat ; Alstom, pour sa part, fournira les équipements aux centrales nucléaires pour la somme de 15 millions d’euros.


Sources et compléments d’information :

Actualités News Environnement, « Le train de l’enfer continue sa route » (08/11/2010)
http://www.actualites-news-environnement.com/24415-train-enfer-continu-route.html

Actu Environnement, « Déchets nucléaires : la Commission européenne propose d’encadrer l’enfouissement en profondeur » (04/11/2010)
http://www.actu-environnement.com/ae/news/dechets-nucleaires-directive-europe-stockage-andra-11305.php4

Enerzine, « Greenpeace attaque Areva pour entreposage illégal » (05/11/2010)
http://www.enerzine.com/2/10716+greenpeace-attaque-areva-pour-entreposage-illegal+.html

Europe 1, « Italie: L'agence de sûreté nucléaire inaugurée » (05/11/2010)
http://www.europe1.fr/International/Italie-L-agence-de-surete-nucleaire-inauguree-304155/

Développement Durable Le Journal, « France Chine : de l’énergie à revendre » (08/11/2010)
http://www.developpementdurablelejournal.com/spip.php?article7149

Usine Nouvelle, « Nouveau réacteur nucléaire aux Pays-Bas : EDF avait posé ses jalons » (05/11/2010)
http://www.usinenouvelle.com/article/nouveau-reacteur-nucleaire-aux-pays-bas-edf-avait-pose-ses-jalons.N141141?xtor=RSS-215