mardi 7 décembre 2010

Lutte contre la déforestation : l’affaire de tous




A la veille de Noël où le sapin est mis à l’honneur, l’ADEME prodigue quelques conseils pour verdir ces fêtes de fin d’année. Chaque année, ce sont près de six millions de sapins qui intègrent les salons des Français. Parmi ce chiffre, ce sont 5 millions de sapins naturels dont 80% sont issus d’exploitations françaises. Les sapins naturels restent selon l’ADEME la solution à privilégier, les sapins en plastique ou en métal, même s’ils sont réutilisables chaque année, étant fabriqués à l’autre bout du monde en des matériaux non recyclés. Mais si le sapin reste à l’honneur durant ces fêtes de noël, ce n’est pourtant pas cet arbre qui est au cœur des discussions. En effet, le Sommet de Cancun réunit l’ensemble des Etats pour traiter des enjeux liés au climat parmi lesquels se trouve l’enjeu de la déforestation. Parmi les principales causes de la déforestation, ce ne sont évidemment pas les sapins de noël mais la culture de l’huile de palme. Considérant la croissance de la production d’huile de palme, notre « beau sapin » pourrait bien se voir détrôner par le palmier. Retour sur l’actualité relative à la déforestation.

Si le Sommet de Nagoya a permis de prendre des engagements au niveau international sur la protection des forêts, le président brésilien est relativement pessimiste en ce qui concerne le Sommet de Cancun. Il regrette notamment l’absence des chefs d’Etat des principaux pays concernés par le réchauffement climatique, sans qui aucun véritable engagement ne peut être décidé, ainsi que le manque d’empressement de leur part à financer la lutte contre la déforestation. Le président Luiz Inacio da Silva place la lutte contre la déforestation parmi ses priorités et s’est engagé à réduire de 39% ses émissions de GES et à réduire la déforestation de 80% d’ici 2020. La déforestation est la cause de 20% des émissions mondiales de CO2, plaçant ainsi le Brésil en 4e position parmi les principaux pays émetteurs de gaz à effet de serre.
Le Sommet de Cancun est en outre l’occasion pour les pays du Sud d’avancer sur le processus du REDD+ qui leur permettrait de combattre la déforestation et de s’adapter aux conséquences du changement climatique grâce à la constitution d’un fonds de 30 milliards de dollars d’ici à 2012. Plusieurs sources de financement sont à l’étude parmi lesquelles la mise en place d’un fonds multilatéral ou d’un système basé sur le marché du carbone. Le financement par le recours au marché carbone reste cependant vivement critiqué par certaines ONG telles que Friends of the Earth : cette dernière craint que les pays industrialisés privilégient la compensation à la réduction des émissions de carbone et redoute une dévalorisation du prix du carbone qui irait en faveur des industries dépassant leurs quotas. Enfin, elle craint une privatisation des ressources naturelles par les pays du Nord aux dépens des populations locales qui ne profiteraient pas des profits générés par le programme de reforestation.

Mais ce programme de reforestation semble selon Greenpeace être mis à mal par le lobby des industries d’huile de palme. En effet, les producteurs d’huile de palme et de pâte à papier ont prévu de tripler leur production d’ici à 2020, un objectif qui pourrait être menacé par les projets du REDD. Greenpeace a ainsi révélé dans l’un de ses rapports dénommés « REDD Alert » que les industriels prévoiraient de jouer sur les ambiguïtés existantes dans certaines définitions : ainsi, les productions d’huile de palme entreraient dans le cadre de la réhabilitation des forêts en terres dégradées et pourraient dès lors bénéficier des fonds prévus à la reforestation. Rappelons-le, l’Indonésie fait partie des pays les plus touchés par la déforestation, une catastrophe environnementale qui fait la fortune de certains : les 40 hommes les plus riches de l’archipel doivent leur fortune aux exploitations des mines de charbon et d’huile de palme.

La lutte contre la déforestation constitue depuis longtemps l’une des priorités des ONG environnementales. Elles ont notamment pour objectif d’alerter l’opinion sur les origines de la déforestation parmi lesquelles, les cultures d’huile de palme par les industriels. Cette huile bon marché, plus connue sur les étiquettes sous le nom « d’huile végétale » se retrouve en effet dans de nombreux produits de consommation courante. Ainsi, Greenpeace a dénoncé ces pratiques industrielles en prenant pour cible l’un des géants de l’alimentaire, Nestlé : on se souvient ainsi d’une vidéo diffusée sur Internet qui montrait un employé d’entreprise mangeant des doigts d’orang-outan soigneusement emballé dans un sachet Kitkat. Le buzz a fonctionné, Nestlé ayant depuis renoncé à acheter de l’huile de palme. De la même façon, d’autres entreprises ont également cessé à utiliser cette huile végétale parmi lesquelles le groupe Findus, Burger King ainsi que le distributeur Casino en mars dernier. Le groupe Ferrero quant à lui refuse de se passer de cette huile, indispensable à la conception de ses produits alimentaires. Cependant, Ferrero a d’ores et déjà exclu l’achat d’huile de palme issue d’Indonésie et s’est engagé à s’approvisionner petit à petit en huile de palme certifiée durable par le « Roundtable on Sustainable Palm Oil » (RSPO) créé par le WWF.

L’engagement des entreprises ne se limite pas à l’utilisation de l’huile de palme. En effet, on peut notamment citer l’exemple de Castorama qui s’est vu récompensé par le FSC International pour son implication relative à la certification et la promotion de ce label. Cette récompense est certainement le fruit d’un partenariat actif avec WWF qui l’accompagne dans l’élaboration de sa stratégie Bois.

Par ailleurs, le 30 juin dernier, la Caisse des dépôts et consignations (CDC) a présenté le Club Carbone forêt-bois dont l’objectif est de valoriser le carbone stocké dans les forêts françaises et les produits à base de bois. Ce club a pour objectif de réunir l’ensemble des acteurs français, publics et privés, souhaitant réduire les émissions de gaz à effet de serre (GES) par le biais des forêts françaises : pouvoirs publics, acteurs financiers, les gestionnaires des forêts, et, notamment, les entreprises souhaitant compenser leurs émissions de GES via des projets forêt-bois au niveau national. Ainsi, on peut notamment citer comme intervenants, la CDC Climat, l’Office National des Forêts (ONF et ONF International), le FCBA, l’ASFFOR, etc.


Le sommet de Cancun, qui prendra fin le 10 décembre prochain, est par ailleurs l’occasion pour France 5 de diffuser le documentaire de Patrick Rouxel dénommé « Green » qui, à travers l’histoire d’un orang-outan alerte l’opinion sur les conséquences liées à la déforestation. La lutte contre la déforestation est en effet l’affaire de tous : elle concerne aussi bien les Etats qui doivent financer les projets de reforestation ; les entreprises par le biais, notamment, de leurs politiques d’achats ; les ONG environnementales qui, notamment, dénoncent les dérives relatives à la gestion du bois ; et enfin des consommateurs via des comportements d’achats responsables.


Sources et compléments d’informations :

Le Monde, « La conférence de Cancun sur le climat "ne va rien donner", estime Lula » (01/12/2010)
http://www.lemonde.fr/planete/article/2010/12/01/la-conference-de-cancun-sur-le-climat-ne-va-rien-donner-estime-lula_1447688_3244.html

20 Minutes, « Sommet de Cancun: d'abord pour lutter contre la déforestation » (29/11/2010)
http://www.20minutes.fr/article/630777/planete-sommet-cancun-abord-lutter-contre-deforestation#xtor=RSS-148
Courrier International, « De l'huile qui fait des milliardaires » (06/12/2010)
http://www.courrierinternational.com/breve/2010/12/06/de-l-huile-qui-fait-des-milliardaires

Greenpeace, « L’accord historique de protection de la forêt indonésienne mis en péril par l’industrie » (23/11/2010)
http://forets.greenpeace.fr/laccord-historique-de-protection-de-la-foret-indonesienne-mis-en-peril-par-lindustrie

Vidéo Youtube, « Greenpeace dénonce Nestlé, qui contribue à la déforestation en Indonésie »
http://www.youtube.com/watch?v=hgcHTHGu5tA

Actu-Environnement, « La CDC lance le Club carbone forêt-bois pour valoriser la séquestration du CO2 par la filière forestière » (01/07/2010)
http://www.actu-environnement.com/ae/news/cdc-bois-fond-sequestration-10592.php4

Sciences et Avenir, « Mon beau sapin... végétal ou artificiel pour ce Noël ? » (02/12/2010)
http://www.sciencesetavenir.fr/depeche/nature-environnement/20101130.AFP6560/mon-beau-sapin-vegetal-ou-artificiel-pour-ce-noel.html

WWF, « Castorama récompensé par le FSC International pour la promotion faite de ce label » (25/10/2010)
http://www.wwf.fr/partenariats-entreprises/actualites-de-nos-partenariats/castorama-recompense-par-le-fsc-international-pour-la-promotion-faite-de-ce-label

lundi 29 novembre 2010

Climat: la Chine projette la mise en place d'un marché de quotas

Mercredi 24 novembre, l’Organisation Météorologique Mondiale a affirmé que les gaz à effet de serre ont atteint un niveau record en 2009 depuis l’époque pré-industrielle. Ainsi, malgré la crise, les niveaux de CO2 et de méthane sont alarmants. Par ailleurs, la Chine occupe la première place mondiale en volume d’émissions. Si ce fait est clairement reconnu par l’Agence Internationale de l’Energie (AIE), la Chine avait cependant du mal à le confirmer, souhaitant que le mode de calcul soit ramené au nombre d’habitants. Pourtant, c’est bien ce qu’a affirmé le négociateur en chef chinois sur les questions climatiques, même si ses dires ont été soumis à la censure dans la transcription officielle de la conférence de presse. Ainsi, consciente de son rôle face aux enjeux liés aux émissions de gaz à effet de serre, la Chine intervient en mettant en place une politique plus stricte en faveur du climat. Alors que le sommet de Cancun est en cours, il paraît intéressant de revenir sur l’un des instruments permettant de limiter les rejets de GES : les marchés de quotas de CO2.


La Chine projette de mettre en place un marché de quotas d’émissions de Gaz à Effet de Serre (GES) dans le cadre de son douzième plan quinquennal (2011-2015). Le plan quinquennal 2006-2010 prévoyait déjà des mesures visant à améliorer le bilan énergétique du pays basées sur des outils réglementaires et administratifs. L’objectif affiché était une réduction de l’intensité énergétique du PIB de 20%. Le marché des quotas se substituerait ainsi à cette approche plus étatique afin d’adopter une démarche qui se voudrait plus libérale. Le nouveau projet quinquennal qui présente le marché de quotas comme une alternative envisageable a ainsi été présenté par le Comité Central du Parti communiste chinois fin octobre et devra être validé début 2011. Ce nouvel outil permettrait ainsi à la Chine de répondre à ses engagements volontaires pris lors du sommet de Copenhague consistant à réduire de 40% à 45% ses émissions de carbone par unité de PIB d’ici à 2020 par rapport à 2005. Il ne reste plus qu’à se décider sur les modalités de mise en œuvre de ce marché. Plusieurs éléments sont encore à déterminer : à quelle échelle ce marché s’étendra-t-il dans un premier temps ? Quels seront les secteurs d’activités concernés par cette obligation ? Et enfin, quelles seront les modalités de mise en place (système d’échanges de quotas ou plafond d’émissions) ? Pour répondre à l’ensemble de ces questions, la Chine n’a pas hésité à faire appel à l’expertise européenne en juillet et en novembre, une troisième rencontre étant planifiée également en décembre. Cet intérêt de la Chine pour le système de quotas d’émissions est une bonne nouvelle pour l’Union Européenne qui souhaite la mise en place d’un marché global intégrant les principaux émetteurs de CO2.

Afin de répondre aux objectifs fixés dans le cadre du protocole de Kyoto (c’est-à-dire une réduction de 8% des GES entre 2008 et 2012, sur la base du niveau de 1990), une directive européenne concernant le marché d’échange de quotas d’émissions de CO2 a été établie dès janvier 2005. Ainsi, l’ensemble des Etats concernés ont eu la responsabilité de répartir des quotas d’émissions parmi les six secteurs industriels les plus émissifs de gaz à effet de serre (production d’énergie, ciment, verre, métaux ferreux, industries minérales, pâtes à papier – les secteurs tels que celui des transports responsable de 25% des émissions de GES ou du bâtiment ne sont pas concernés). Ainsi, chaque année, un Plan National d’Allocations des Quotas (PNAQ) présenté par chaque pays de l’UE et ratifié par la Commission européenne détermine la répartition de ces quotas entre les différents secteurs. Ces quotas sont ensuite échangeables entre les industriels sur un marché qui se caractérise par un système de bourses électroniques centralisées.

Une nouvelle décision vient modifier le fonctionnement de ce marché d’échanges de quotas. En effet, en novembre 2010, les sénateurs, se basant sur le code de l’environnement et sur la loi de finances rectificative de 2008, ont affirmé leur volonté de voir modifier deux éléments : d’une part, dès 2011, la France fera payer aux industriels 5 à 15% des quotas alloués en 2011 et 2012 (les quotas étaient jusqu’alors délivrés gratuitement). Le prix des quotas correspondra au prix moyen constaté sur les 12 derniers mois sur le marché d’échange de quotas. Seulement une partie des industriels serait concernée par ces quotas payants. Par ailleurs, dans le cadre du PNAQ, la France a mal évalué les prospectives concernant les nouveaux entrants. Ainsi, la réserve française est estimée à 2,74 millions de tonnes de CO2 lorsque le besoin réel s’évalue à hauteur de 9 millions de tonnes de CO2. Les nouveaux entrants seront ainsi contraints d’acheter des quotas sur le marché et ne profiteraient pas comme leurs concurrents de quotas gratuits ce qui créerait des distorsions de concurrence. La mise en place de quotas payant par la France permettrait de rééquilibrer le marché ; D’autre part, les industriels ayant diminué leur activité n’obtiendront pas la totalité des quotas prévus initialement. En effet, les sénateurs estiment que l’allocation des quotas échangeables doit être cohérente : ainsi, si l’activité a diminué de plus de 25% depuis 2007, le nombre de quotas doit être revu à la baisse pour éviter tout effet d’aubaine notamment dû à la revente du surplus de quotas sur le marché.


Le Sommet de Cancun sera en outre déterminant dans la lutte contre le changement climatique. En effet, le marché des quotas ne représente qu’un outil qui pourrait s’avérer peu efficace sans un engagement multilatéral des différents Etats. La Chine y sera notamment présente. Si elle a reconnue sa responsabilité vis-à-vis des questions liées au Climat, elle souhaite que les pays dits développés assument leurs responsabilités (ce qui n’est pas sans viser en particulier les Etats-Unis). La Chine, qui devient notamment le leader mondial de production d’énergies renouvelables, est un acteur qui semble apte à prendre des engagements sérieux. Ce ne sera que le 10 décembre, à la fin du Sommet mondial de Cancun que l’on pourra ou non confirmer ce vent d’optimisme… En effet, rappelons-le, si le marché des quotas est une solution, elle n’en demeure pas moins la solution en faveur du climat.


Sources et compléments d'information:

Actu Environnement, « PLF 2011 : les sénateurs durcissent l'attribution des quotas de CO2 » (25/11/2010)
http://www.actu-environnement.com/ae/news/senat-quotas-payants-CO2-plf-11437.php4

Actu Environnement, « Conférence de Cancún sur le climat : quels enjeux ? » (29/11/2010)
http://www.actu-environnement.com/ae/news/conference-climat-cancun-enjeux-11446.php4

Actu Environnement, « La Chine sur le point de créer un marché d'échange de quotas de CO2 » (18/11/2010)
http://www.actu-environnement.com/ae/news/chine-marche-carbone-co2-europe-ets-11382.php4

Le Monde, « La Chine admet être le 1er émetteur mondial de gaz à effet de serre », (23/11/2010)
http://www.lemonde.fr/planete/article/2010/11/23/la-chine-admet-etre-le-1er-emetteur-mondial-de-gaz-a-effet-de-serre_1443801_3244.html

Le Monde, « Les gaz à effet de serre ont atteint des niveaux records en 2009 » (24/11/2010)
http://www.lemonde.fr/planete/article/2010/11/24/les-gaz-a-effet-de-serre-ont-atteint-des-niveaux-records-en-2009_1444498_3244.html

Le Journal Développement Durable, « Climat : La Chine prépare son marché du carbone » (22/11/2010)
http://www.developpementdurablelejournal.com/spip.php?article7186

« Guide Pratique du marché des quotas d’émissions de CO2 », Ministère de l’Ecologie et du Développement Durable, ADEME, 2005
http://www.developpement-durable.gouv.fr/IMG/ecologie/pdf/guide_quotas_final.pdf

mardi 16 novembre 2010

Energies fossiles: une question de subventions



Le prix Pinocchio 2010 du développement durable a été décerné à… Somdiaa, Eramet et le Crédit Agricole ! Trois entreprises se sont en effet vues décerner ce prix pour le moins peu prestigieux par les Amis de la Terre suite à un vote auprès de 6000 internautes. Ainsi, le Crédit Agricole, à l’origine dénommée la banque verte car reconnue comme étant « la banque des agriculteurs » semblent jouer sur les mots : « It’s time for Green Banking » arbore-t-elle dans l’une de ses campagnes de communication. Une publicité qui n’est pas du goût des Amis de la Terre qui les accusent de greenwashing : par le biais de cette publicité, le Crédit Agricole se place comme étant un acteur de la croissance verte alors que la banque française est à l’origine d’investissements massifs en faveur de projets de développement des énergies fossiles tels que la centrale à charbon de Medupi en Afrique du Sud qui a soulevé la polémique. A l’heure où l’épuisement des énergies fossiles et les impacts qu’elles génèrent figurent parmi les grandes urgences environnementales, le Crédit Agricole ne peut ainsi décemment se définir comme une entreprise verte. Qu’en est-il de la part des Etats ? Le Crédit Agricole ne semble pas être le seul à être pointé du doigt. Alors que le G20 s’est réuni à Séoul ces 11 et 12 novembre, la question des énergies fossiles a donné lieu à des rapports et comptes-rendus préalables permettant un véritable état des lieux de la situation mondiale.


Les représentants du G20 semblaient s’accorder : il faut stopper les subventions inefficaces aux énergies fossiles (encore faut-il pouvoir définir ce qu’est une « subvention inefficace »…). Cette déclaration a été faite à Pittsburg en septembre 2009, puis réaffirmée lors du sommet de Toronto de juin 2010. Pourtant, selon l’Agence Internationale à l’Energie (AIE), de nombreuses subventions en faveur des énergies fossiles sont encore établies (environ 312 milliards de dollars en 2009) ce qui n’est pas sans conséquences : gaspillage, volatilité des prix, contexte anticoncurrentiel vis-à-vis des énergies renouvelables… Ainsi, selon le rapport World Energy Outlook 2010 (WEO 2010) rédigé par l’AIE, la suppression de ces subventions pourrait permettre une réduction de 5,8 % des émissions de CO2 (soit 2 milliards de tonnes) à horizon 2020 et permettrait de réorienter les investissements en faveur des énergies renouvelables. Un avis partagé par le rapport du Groupe Consultatif de haut niveau qui a évalué à 8 milliards de dollars l’investissement qui pourrait de fait être établi tous les ans par les pays industrialisés en faveur de la lutte contre les changements climatiques dans les pays du sud qui, rappelons-le sont les premiers à être impactés par les effets qu’ils génèrent. Cependant, selon les ONG Oil Change International et Earth Track, les engagements pris par le G20 pour stopper les subventions inefficaces n’ont pas donné lieu à des mesures concrètes. Des discussions n’en sont jusqu’alors ressorties que des inactions. En effet, un rapport publié début novembre liste les « exclusions », c’est-à-dire les subventions qui ne sont pas concernées par cet engagement : parmi elles, les subventions pour les énergies fossiles qui sont moins carbonées que d’autres, celles qui permettent un développement rural et la création d’emplois ou bien celles qui sont « déguisées » en avantages fiscaux. De plus, l’ONG Les Amis de la Terre souligne l’oubli concernant les soutiens publics à l’industrie fossile effectués, notamment, via la Banque Mondiale. Un détail qui n’est pas sans rappeler la vidéo de Greenpeace intitulée « où va mon argent ? »…

Ainsi, Les Amis de la Terre ont demandé à la Banque Mondiale de cesser les prêts ou garanties en faveur des énergies fossiles et de les réorienter vers le secteur des énergies renouvelables. 63% des prêts issus de la Banque Mondiale pour l’énergie sont dédiés aux combustibles fossiles (la part dédiée au charbon a même augmenté entre 2007 et 2008). En outre, l’ONG Oil Change International, dans son rapport « Energy for the poor ? » a démontré qu’aucuns des prêts dédiés aux énergies fossiles émanant de la Banque Mondiale sur les années fiscales 2009 et 2010 n’étaient directement destinés à favoriser l’accès à l’énergie pour les plus pauvres.

Si les énergies fossiles s’épuisent peu à peu, une question se pose alors : à quand l’apparition des alternatives au pétrole ? L’Université de Californie s’est posée la question et est parvenue à une réponse plutôt déconcertante au vue de l’urgence de la situation : selon cette étude publiée dans la revue « Science & Technology », il faudrait attendre près de 90 ans avant de voir apparaître les technologies de remplacement au pétrole. La méthode se base sur les marchés boursiers et les prédictions des investisseurs concernant la période de maturité des nouvelles technologies. La date est ainsi évaluée en fonction de la capitalisation boursière basée sur les actions et dividendes émanant des industries pétrolières publiques et des sociétés d’énergies alternatives. Cette méthode, bien que basée sur des données purement mercantiles, a déjà fait ses preuves dans de nombreuses prédictions. Face à ces résultats, on est amené à penser qu’une intervention rapide et efficace de la part des principaux Etats est d’autant plus nécessaire afin de favoriser plus rapidement des énergies alternatives.


L’humanité aura épuisé en près de 200 ans les réserves accumulées sur plusieurs centaines de millions d’années. Au vue des enjeux, la question de la gestion des énergies fossiles (qu’il s’agisse de l’exploitation, de la consommation de ces énergies, de la recherche d’alternatives ou bien sûr des subventions attribuées à ce secteur) constitue une véritable urgence. Pourtant, le sujet des énergies fossiles n’a pas été abordé lors du G20 de Séoul. Un « oubli » qui ne présage rien de réellement positif à l’approche du prochain sommet des Nations Unies sur le réchauffement climatique qui aura lieu à Cancun du 29 novembre au 10 décembre 2010…


Sources et compléments d’information :

Le Monde, « Prix Pinocchio : Les Amis de la Terre décernent les bonnets d'âne du développement durable » (09/11/2010)
http://www.lemonde.fr/planete/article/2010/11/09/prix-pinocchio-les-amis-de-la-terre-decernent-les-bonnets-d-ane-du-developpement-durable_1437842_3244.html

Actu Environnement « G20 : la suppression des subventions aux énergies fossiles reste à confirmer » (10/11/2010)
http://www.actu-environnement.com/ae/news/g20-seoul-subventions-energies-fossiles-11339.php4

Développement Durable Le Journal, « Énergies fossiles : Ces subventions qui endettent le Climat » (15/11/2010)
http://www.developpementdurablelejournal.com/spip.php?article7164

Actualité News Environnement, « Energie fossiles et prêts de la Banque mondiale » (08/10/2010)
http://www.actualites-news-environnement.com/24262-Energie-fossiles-prets-Banque-Mondiale.html

Enerzine, « Les substituts au pétrole : pas avant 90 ans ! » (10/11/2010)
http://www.enerzine.com/10/10754+les-substituts-au-petrole---pas-avant-90-ans+.html

lundi 8 novembre 2010

Actualités sur le nucléaire en Europe

Le convoi radioactif France - Allemagne

Après un voyage de trois jours, le « convoi le plus radioactif du monde » tel que qualifié par l’ONG Greenpeace, est arrivé en gare de Dannenberg en Allemagne ce lundi 8 novembre. Ce convoi, qui a quitté la gare de Valognes (Normandie) vendredi dernier, contenait un total de 11 « Castor » (Cask for storage and transport of radioactive material), eux-même constitués de 28 « Canisters » (conteners composés de déchets vitrifiés). Plus concrètement et selon les données de l’Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs, c’est au total une radioactivité de 3 000 PBq (Peta Becquerel) qui a été acheminée vers l’Allemagne, soit 10 fois plus que la radioactivité dégagée par la catastrophe de Tchernobyl. Greenpeace a ainsi mobilisé de grands moyens contre ce convoi, d’une part en incitant les citoyens à intervenir par le biais de manifestations ou d’opérations de blocage pacifiques ; et d’autre part en portant plainte contre Areva pour ne pas avoir respecté les contraintes de sécurité pourtant indispensables pour ce type de convoi. En effet, les déchets radioactifs auraient été entreposés en gare de Valognes en date du 25 octobre, pour un départ prévu 10 jours plus tard, dans une Installation Nucléaire de Base (INB) non déclarée (les INB doivent être autorisées par décret par l’Autorité de Sureté Nucléaire et soumises à enquêtes publiques). Le trajet prévu pour le convoi a ainsi été interrompu à diverses reprises par plusieurs dizaines de milliers de manifestants d’abord en France, puis en Allemagne, destination finale des déchets nucléaires. Et, en Allemagne tout comme en France, les déchets radioactifs seront entreposés dans un lieu inadapté pour le stockage de déchets dangereux, c’est-à-dire dans un hangar de Gorleben. Sylvain Trottier de Greenpeace a ainsi dénoncé l’impasse dans laquelle l’on se trouve : « Il n’existe aucune solution viable pour les déchets nucléaires. Personne n’en veut et personne ne sait quoi en faire ».

Commission européenne : enterrer les déchets nucléaires pour mieux les gérer

Ce constat a également été fait par la Commission européenne qui a présenté de fait le 3 novembre dernier un projet de directive sur la gestion des déchets nucléaires basé sur le stockage en profondeur. Chaque année, ce sont près de 7000 m3 de combustibles usés issus des 147 centrales nucléaires d’Europe qui sont stockés dans des entrepôts ou installations provisoires. Il n’existe actuellement pas d’installations de stockage définitif. La Commission, avec l’appui d’experts scientifiques et techniques, a ainsi fait le choix des installations de stockage souterraines. La directive est prévue pour 2011. Les Etats membres auront alors un délai de 4 ans afin de mettre en place un programme national allant en ce sens. Les pays détenant peu de centrales, ce qui n’est pas le cas de la France, auront la possibilité de mutualiser la gestion des installations de stockage. Heureusement, la directive interdit la création d’installations de stockage dans des pays tiers. Par ailleurs, bien que la Commission souhaite que la population soit informée et qu’elle intervienne dans les décisions relatives à la gestion de ces déchets nucléaires, le Réseau Sortir du Nucléaire dénonce « une orientation dangereuse et antidémocratique » dans le sens où le projet de directive a été élaboré sans réelle consultation de la population.

Action de la population face au nucléaire ?

Mais que peut faire la population lorsqu’elle s’oppose au nucléaire ? Des associations et ONG telles que Greenpeace tentent d’orienter la population afin de faire entendre sa voix. Ainsi Greenpeace intervient au nom de la société civile en portant plainte contre Areva, organise des actions de mobilisation d’ordre pacifique, notamment pour ralentir les convois de déchets nucléaires,… Greenpeace se donne également pour rôle d’informer la population. Ainsi, l’ONG a été à l’initiative d’une vidéo qui se veut synthétique et pédagogue afin d’expliquer le rôle des banques vis-à-vis des activités nucléaires, en pointant notamment du doigt la BNP Paribas, principal financeur de ce type de projets. L’argent des épargnants est en effet réinvesti dans divers projets : dans des projets publics, des activités spéculatives mais également dans des projets privés tels que l’extraction de pétrole ou les activités nucléaires (dont la centrale Angra 3 au Brésil conçue à partir d’une technologie considérée comme obsolète datant de plus de 30 ans), ces derniers étant la plupart du temps soutenus par des garanties d’Etat. La vidéo est visible sur le site : http://ouvavotreargent.com/

Le nucléaire en Europe : zoom sur l’Italie, l’Allemagne et la France

Par ailleurs, ce début de mois a également été marqué par la création en Italie d’une nouvelle agence de sûreté nucléaire. La création de cette nouvelle agence entre dans le cadre de la stratégie énergétique nationale qui vise à développer l’activité nucléaire de l’Italie, en collaboration notamment avec EDF - EDF participera également à la construction d’un réacteur nucléaire aux Pays-Bas, en partenariat avec Delta.

En Allemagne, le convoi de déchets radioactifs intervient une semaine après l’autorisation par les députés d’allonger la durée de vie des réacteurs nucléaires en dépit de son engagement de limiter leur activité à horizon 2020. Cependant, malgré les progrès établis par l’Allemagne dans le cadre des énergies renouvelables, l’allongement de la durée de vie des réacteurs était, semble-t-il, la seule solution alternative au charbon dont l’Allemagne dépend encore beaucoup.

En France, le nucléaire représente un véritable business, et pas seulement en faveur de BNP Paribas. En effet, la visite du président chinois Hu Jintao à l’Elysée a été l’occasion de signer une série de contrats d’une valeur totale de 16 milliards d’euros. Ainsi, Areva a conclu un contrat avec le producteur d’électricité chinois pour la construction d’une usine de retraitement du combustible nucléaire et la fourniture de 20 000 tonnes d’uranium sur 10 ans et a négocié la livraison de deux réacteurs de type EPR ce qui, malheureusement pour Areva, n’a pas aboutit sur un contrat ; Alstom, pour sa part, fournira les équipements aux centrales nucléaires pour la somme de 15 millions d’euros.


Sources et compléments d’information :

Actualités News Environnement, « Le train de l’enfer continue sa route » (08/11/2010)
http://www.actualites-news-environnement.com/24415-train-enfer-continu-route.html

Actu Environnement, « Déchets nucléaires : la Commission européenne propose d’encadrer l’enfouissement en profondeur » (04/11/2010)
http://www.actu-environnement.com/ae/news/dechets-nucleaires-directive-europe-stockage-andra-11305.php4

Enerzine, « Greenpeace attaque Areva pour entreposage illégal » (05/11/2010)
http://www.enerzine.com/2/10716+greenpeace-attaque-areva-pour-entreposage-illegal+.html

Europe 1, « Italie: L'agence de sûreté nucléaire inaugurée » (05/11/2010)
http://www.europe1.fr/International/Italie-L-agence-de-surete-nucleaire-inauguree-304155/

Développement Durable Le Journal, « France Chine : de l’énergie à revendre » (08/11/2010)
http://www.developpementdurablelejournal.com/spip.php?article7149

Usine Nouvelle, « Nouveau réacteur nucléaire aux Pays-Bas : EDF avait posé ses jalons » (05/11/2010)
http://www.usinenouvelle.com/article/nouveau-reacteur-nucleaire-aux-pays-bas-edf-avait-pose-ses-jalons.N141141?xtor=RSS-215


jeudi 4 novembre 2010

Le scepticisme au cœur de l’environnement


Le scepticisme ne cesse de rythmer les débats relatifs à l’environnement. Il concerne non seulement les mouvements d’experts, plus connus sous le nom de « climato-sceptiques », qui remettent notamment en cause la responsabilité de l’homme vis-à-vis du réchauffement climatique ; Mais il concerne aussi l’ensemble des acteurs qui interviennent directement ou indirectement sur la politique environnementale : le scepticisme touche à la fois certaines entreprises qui souhaitent minimiser leur responsabilité par rapport à l’environnement ; ou bien les citoyens et ONG vis-à-vis de l’action du gouvernement. Le scepticisme se trouve ainsi au cœur de l’actualité. Retour sur cette tendance où le doute prédomine.


« L'augmentation de CO2 et, à un moindre degré, des autres gaz à effet de serre, est incontestablement due à l'activité humaine ». Telle est l’une des conclusions du rapport délivré jeudi dernier par l’Académie des sciences à la ministre de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche. Ce rapport a fait suite à l’organisation d’un débat d’experts issus des professions de climatologues, physiciens, mathématiciens, biologistes, etc., le 20 septembre dernier, afin de confronter les différents points de vue et de délivrer un rapport approuvé par l’ensemble de la profession, c’est-à-dire à la fois par les scientifiques convaincus et les climato-sceptiques. Parmi les représentants des climato-sceptiques présents, on peut notamment citer l’ancien ministre très médiatisé Claude Allègre. Le climato-scepticisme a contribué à sa renommée : ce dernier dénonçait une « imposture climatique », un « système mafieux et totalitaire » et a pointé du doigt les conclusions du Giec en réfutant plusieurs de ses arguments. Pourtant, l’Académie des Sciences a confirmé les conclusions du Giec en désavouant de fait les climato-sceptiques. Ce rapport semble malgré tout satisfaire Claude Allègre qui a apposé sa signature sur le document, qualifiant ce dernier de « compromis » : M Allègre aurait apprécié la mise en avant de l’incertitude liée au climat et des relations de causes à effet qui en découle. Un tel rapport aura-t-il suffit à convaincre les climato-sceptiques ?

Rien n’est moins sûr. Les climato-sceptiques sont bien présents et pas seulement sur le territoire français. La vague contradictoire vis-à-vis du climat a également touché les Etats-Unis, vague sur laquelle certains industriels européens semblent surfer pour combler leurs intérêts. En effet, certains sénateurs américains niant les dangers du changement climatique ou s’opposant à la loi américaine « Cap and Trade » sur le climat ont pu bénéficier de financements émanant de certaines industries européennes. Au total, ces sénateurs ont ainsi reçu, en 2010, 306 000 dollars de la part de ces industriels. Ces chiffres ont été délivrés par un rapport du Climate Network Europe dont les sources proviennent notamment de la Commission fédérale électorale américaine. Selon Sébastien Blavier, responsable du Pôle International du Réseau Action Climat France, ces financements ont été faits en toute connaissance de cause par les industriels qui ne souhaitent pas d’une évolution des engagements des Etats-Unis en faveur du Climat. Ces entreprises constituent un lobby puissant auprès des instances européennes refusant que les objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre passent de 20 à 30% d’ici 2020. La raison évoquée : ces objectifs constitueraient pour eux un frein à la concurrence, notamment vis-à-vis des industries implantées aux Etats-Unis, qui ont développé une réglementation moins stricte que l’Europe. Ainsi, en finançant les sénateurs américains climato-sceptiques, les industriels viseraient à bloquer toute nouvelle initiative en faveur du Climat de la part des Etats-Unis et, de fait, d’empêcher également l’Europe de réviser ses objectifs. Bien que ces financements ne soient pas très élevés, ils ont suffit à alimenter la polémique dans les médias qui remettent en cause la responsabilité sociétale des industries concernées.

Le scepticisme a également touché les citoyens. Alors que les pronostics semblent miser sur Jean-Louis Borloo en tant que remplaçant de M Fillon, l’heure en est au bilan. Un sondage réalisé par Opinion Way pour le compte de Terra Eco démontre ainsi que 74% des français considéreraient que le Grenelle de l’Environnement est un échec. Les Français douteraient ainsi de l’efficacité d’une telle démarche, un doute qui semble partagé par certaines ONG environnementales. En effet, si le Grenelle a permis de mettre en avant des objectifs clairs en faveur de la protection de l’environnement, la mise en place des engagements semble bien plus laborieuse : abandon de la taxe carbone qui est relayée à l’échelle européenne, révision de la fiscalité en faveur des équipements photovoltaïques, report de la taxe kilométrique poids lourds à 2012, abandon sur la taxe pique-nique qui visait à réduire la consommation de produits à usage unique, révision du bonus-malus sur les véhicules, etc. Concernant le secteur des transports, sur 34 engagements pris, seuls 3 ont été réalisés, et 22 sont en cours de réalisation… Certes, le Grenelle ne s’est pas seulement caractérisé par une série d’échecs ; Certes, il a notamment permis la mise en place de nombreux outils fiscaux (70 dispositions fiscales), et d’une réglementation plus adaptée (450 articles de loi) ; et il est vrai que la majorité des engagements est souvent peu connue du grand public. Mais en ne tenant pas une partie de ses engagements, l’Etat, via le Grenelle de l’Environnement, perd de sa crédibilité vis-à-vis de sa capacité à répondre aux enjeux environnementaux. Le gouvernement doit ainsi faire face à une crise de confiance de la part des citoyens sur les dossiers environnementaux.

Par ailleurs, suite à l’échec concernant le Sommet de Copenhague, on pouvait s’inquiéter quant aux résultats de la conférence sur la biodiversité de Nagoya. En effet, Copenhague avait laissé un goût amer : pas d’engagements concrets au niveau international, absence des principaux Etats concernés,… bref, un vent d’inaction avait touché l’ensemble des représentants. Même si de nombreux acteurs semblaient sceptiques quant à la finalité de cet évènement, la conférence de Nagoya a finalement été à la hauteur des espérances : engagements concrets en faveur d’une pêche durable (la polémique sur l’absence d’interdiction de la pêche du thon rouge aura-t-elle influencé ces engagements ?) ; engagements contre la déforestation ; protection des aires maritimes (même si le pourcentage de 10% des aires maritimes est considéré comme trop faible de la part des ONG). Même si l’on peut constater quelques bémols dans le bilan de cette conférence, et même si les financements nécessaires ne sont pas encore réunis, les engagements concrets pris à Nagoya peuvent laisser présager qu’ils inspireront l’ensemble des dirigeants lors du futur sommet de Cancun, prochain rendez-vous clé sur les enjeux climatiques.


Le scepticisme accompagne les débats concernant l’environnement du fait de l’absence de certitude qui l’accompagne. De cette absence de certitude est d’ailleurs né le principe de précaution. Est-ce que le scepticisme peut alors représenter un frein à l’action en faveur de la protection de l’environnement ? Dans un sens, il peut l’être car l’action va parfois à l’encontre des intérêts immédiats de certains acteurs. L’action a un coût que certaines entreprises et Etats ne sont pas prêts d’assumer. Mais d’un autre côté, la remise en cause des études scientifiques et des actions du gouvernement ne permet-elle pas d’alimenter le débat et, finalement, d’aboutir à des résultats concluants ? Ainsi, face au scepticisme des citoyens vis-à-vis de la capacité de l’Etat à gérer les enjeux environnementaux, ce dernier, à l’approche de 2012, devra songer à tenir davantage les engagements pris dans le cadre du Grenelle ; l’action deviendra sa meilleure alliée.


Sources et compléments d'information:

Les Echos, « Environnement : l’Académie des Sciences désavoue les climato-sceptiques » (28/10/2010)
http://www.lesechos.fr/economie-politique/france/actu/020895911845-environnement-l-academie-des-sciences-desavoue-les-climato-sceptiques.htm

Blogs Le Monde, « Des industriels européens manœuvrent contre la loi américaine sur le climat » (26/10/2010)
http://ecologie.blog.lemonde.fr/2010/10/26/des-industriels-europeens-manoeuvrent-contre-la-loi-sur-le-climat-americaine/

Actu Environnement, « Biodiversité : des commentaires nuancés à l’issue de la conférence de Nagoya », (03/11/2010)
http://www.actu-environnement.com/ae/news/nagoya-biodiversite-cdb-commentaires-ong-politique-11294.php4

Cdurable.info, « Grenelle de l’Environnement : un échec pour 3 Français sur 4 » (24/10/2010)
http://www.cdurable.info/Grenelle-Environnement-un-echec-pour-les-francais-Sondage-Terra-Eco-Opinion-Way,2959.html


mercredi 27 octobre 2010

De l’environnement sur nos étiquettes dès juillet 2011


Chantal Jouanno, la Secrétaire d’Etat à l’Ecologie, a annoncé le lancement de l’étiquetage environnemental pour juillet 2011. L’objectif est d’informer les consommateurs sur l’empreinte environnementale des produits. Selon une étude Ipsos, 86% des Français disent exprimer un intérêt certain pour ce type d’information. Ainsi, pour les secteurs de l’alimentaire et de l’habillement, l’étiquetage contiendra des informations concernant : l’indice carbone des produits exprimé en grammes équivalent CO2, la consommation en eau, les rejets toxiques, et la durabilité des ressources naturelles. L’expérimentation n’a pas de caractère obligatoire et se fera sur la base du volontariat sur une période d’un an. Il était temps diront certains ! En effet, l’étiquetage environnementale, l’une des mesure phare annoncée par le Grenelle 2, était initialement prévu pour le 1er janvier 2011.


Étiquetage environnemental : un outil pédagogique

L’objectif de l’étiquetage environnemental est d’orienter les choix des consommateurs vers des produits à moindre impact sur l’environnement et inciter de fait les industriels à diminuer au maximum ces impacts.
L’une des questions que l’on peut alors se poser est : l’étiquetage sera-t-il suffisamment clair et compréhensible pour les consommateurs ? En effet, la difficulté dans le cadre de la méthodologie appliquée est non seulement de faire le choix de la nature de l’information à mettre en avant (doit-on informer le consommateur sur le contenu en carbone du produit ? ou sur les kilomètres parcourus nécessaires à l’acheminement du produit, de la conception à la mise en rayon ? etc.) mais aussi de mettre en place un système lisible et accessible. Un dicton bien connu peut ainsi résumer le problème ici posé : trop d’information tue l’information. Au même titre finalement que pas assez d’information tue également l’information, constat que l’on serait davantage en mesure de faire dans l’état actuel des choses. La mise en place d’un étiquetage n’est donc pas simple. Il faut faire des choix : des choix sur la nature de l’information donc, mais aussi des choix sur la méthodologie appliquée qui dépend en grande partie de l’information disponible aux différentes étapes de production et d’acheminement des produits. Des initiatives ont déjà été mises en place et permettront d’orienter les différents acteurs qui sont au cœur de l’expérimentation qui débutera en juillet 2011.


L’étiquetage environnemental : un outil qui a déjà fait ses preuves

L’étiquetage environnemental existe déjà. On peut ainsi choisir depuis 1995 son électroménager en fonction de la consommation énergétique du produit. Le principe est relativement simple : une échelle de couleur permet aux consommateurs d’évaluer rapidement l’empreinte énergétique du produit par rapport aux autres.

En 2007, Casino se distingue de ses concurrents en proposant un étiquetage environnemental de ses produits qui, initialement, devait mettre en avant trois éléments : la masse et contenu en CO2 de l’emballage, la recyclabilité du packaging et la distance parcourue du produit, de la production au consommateur. Finalement, Casino fera le choix de présenter seulement l’indice carbone des produits en gramme équivalent CO2, un indice peut-être plus simple, plus lisible et accessible, mais surtout moins contraignant à mettre en place pour l’enseigne. Cette initiative soutenue par l’ADEME a notamment été mis en place par la société BIO Intelligence Service. Si 3000 produits devaient être concernés par l’étiquetage environnemental, c’est aujourd’hui près de 500 qui le sont réellement. Les objectifs ont ainsi largement été revus à la baisse. On peut ainsi s’interroger sur la raison d’une révision de ces objectifs : difficulté de mise en place ? Données manquantes ? Succès mitigé auprès des consommateurs ?
Leclerc lui emboite le pas en 2008 en indiquant sur le ticket de caisse le bilan CO2 du panier de course du client (exprimé en kg équivalent CO2). Cependant, avec cette initiative, le client ne peut faire le constat qu’une fois les produits achetés et ne peut déterminer lequel des produits sélectionnés est le plus consommateur de CO2. En d’autres termes, s’il veut diminuer son empreinte carbone, c’est un peu comme au loto : c’est au hasard et il n’obtiendra le résultat qu’une fois à la caisse. Un petit jeu auquel le client peut très vite se lasser.

En 2008, la Caisse d’Epargne initie l’étiquetage appliqué aux produits bancaires, une initiative qui s’intègre au programme Bénéfices Futurs de la banque mutualiste en faveur d’un développement durable. Ainsi, en partenariat notamment avec Les Amis de la Terre et WWF France, la Caisse d’Epargne a mis en place un étiquetage informant les clients sur la « sécurité », c’est-à-dire sur les risques financiers liés au produit bancaire, sur la « responsabilité » ou l’intégration de critères sociaux et environnementaux liés à la conception du produit, et sur le « climat », c’est-à-dire sur les émissions carbones déduites des activités ou biens financés. La méthodologie appliquée a été rendue publique afin que les autres établissements bancaires puissent l’appliquer. Cependant, non seulement, aucun autre établissement bancaire français n’a appliqué cette même démarche, mais, en outre, la Caisse d’Epargne a abandonné dès 2010 l’étiquetage de ses produits. Un abandon que les Amis de la Terre n’ont pas hésité à condamner : en effet, dans un contexte de crise économique et financière, et surtout de crise de confiance, la Caisse d’Epargne a certainement fait le mauvais choix en allant à contre pied d’un système que l’on souhaiterait plus accès sur la transparence.


Appréhension de la part des industriels

L'Association nationale des industries de l'agroalimentaire (Ania) a souligné lors de son congrès à Paris la difficulté d’obtenir certaines données nécessaires à l’étiquetage, notamment celles liées au transport et à la fabrication surtout lorsque le produit est issu de l’étranger. L’Ania a pu constater ces difficultés lors d’une expérimentation préalable en partenariat avec l’ADEME sur 300 références dont 150 produits alimentaires. L’Ania appelle ainsi à une harmonisation des méthodes d’évaluation afin qu’elles soient applicables à l’ensemble du secteur.


Carrefour : l’étiquetage « sans OGM »

Carrefour va même plus loin en proposant un étiquetage « sans OGM » sur 300 de ses produits alimentaires. Cette démarche est notamment approuvée par WWF, Greenpeace et par l’icône anti-OGM, José Bové. Carrefour veut ainsi anticiper le projet de décret sur l’étiquetage de ce type de produits actuellement examiné par le Haut Conseil des biotechnologies. Selon Carrefour, cette information sur le contenu OGM dans les produits alimentaires répond à une véritable demande de la part des consommateurs, chiffres à l’appui : selon une étude Ifop, 32% des Français auraient arrêté de consommer certains produits dès qu’ils ont su qu’ils étaient issus d’OGM. Cet étiquetage demande de la part de Carrefour une véritable réorganisation dans le sens où il nécessite une traçabilité parfaite des produits, un accès à l’information permis grâce à une série de contrôle à chaque étape de vie du produit, du berceau au tombeau, c’est-à-dire, de l’élevage à la mise en rayon. Une réorganisation qui a un prix mais qui sera en majeure partie absorber par Carrefour: si les producteurs et éleveurs vendent leurs produits 8% plus chers à l’enseigne de grande distribution, les produits Carrefour étiquetés sans OGM seront en moyenne 2% plus cher que les produits alimentaires équivalents.

En l’absence de données scientifiques quant à l’impact sur la santé et l’environnement qu’impliquent la culture et la consommation d’OGM, la France résiste tant qu’elle peut à la généralisation des OGM dans les rayons alimentaires sous couvert du principe de précaution. Pourtant, les nombreuses importations provenant notamment des Etats-Unis ont intégré les OGM dans nos assiettes sans qu’on ne le sache vraiment. Cette initiative a donc également l’avantage de mettre la transparence au cœur de l’acte de consommation et de rendre le consommateur responsable et libre de choisir.


L’étiquetage environnemental fera ainsi partie de nos futurs emballages alimentaires. Il viendra ainsi s’ajouter aux nombreux labels (bio, commerce équitable, etc.), aux informations sur le contenu alimentaire (huile de palme, etc.) et pourquoi pas à la future taxe carbone. La question désormais est de savoir si le consommateur intégrera réellement ce nouveau critère dans ses choix de consommation. Les expériences passées, notamment sur l’électroménager, ont pu démontrer que ce critère a une véritable importance à aux yeux du consommateur. Mais le plus important finalement est de permettre au consommateur de faire ses choix en toute connaissance de cause, en d’autres termes, il s’agit de lui donner d’autres critères de choix venant s’ajouter à ceux du prix et de la qualité.


Sources et informations complémentaires :

La France Agricole, « Etiquetage environnemental des produits, Premières expérimentations en juillet » (22/10/2010)
http://www.lafranceagricole.fr/actualite-agricole/etiquetage-environnemental-des-produits-premieres-experimentations-en-juillet-33856.html

Zegreenweb.com, L’étiquette environnementale sera expérimentée en juillet prochain (25/10/2010)
http://www.zegreenweb.com/sinformer/entreprise-consommation/letiquette-environnementale-sera-experimentee-en-juillet-prochain,17650

Le JDD, « Carrefour lance un étiquetage sans OGM », (22/10/2010)
http://www.lejdd.fr/Economie/Entreprises/Actualite/Carrefour-lance-un-etiquetage-sans-OGM-228741/

Site Développement Durable.com, Etiquetage environnemental : à quand le prix carbone sur les produits de consommation ? (29/03/2010)
http://www.developpementdurable.com/conso/2010/03/A4466/etiquetage-environnemental-a-quand-le-prix-carbone-sur-les-produits-de-consommation.html

jeudi 21 octobre 2010

2010, année de la biodiversité: l'action au coeur du débat



2010 est l’année de la biodiversité : plus qu’un simple symbole, il s’agit de mettre la biodiversité au cœur de la problématique environnementale et de trouver des solutions durables et réalisables permettant d’atteindre les objectifs fixés lors des différents sommets mondiaux. C’est donc dans cette optique que s’est tenu dès le 18 octobre le Sommet de la Biodiversité à Nagoya au Japon. En réunissant les 193 pays signataires de la Convention sur la biodiversité biologique, l’objectif est d’établir des mesures qui soient à la hauteur des enjeux écologiques. Au cœur des préoccupations figurent notamment la déforestation, responsable de la perte de nombreux écosystèmes et de l’augmentation des émissions de gaz à effet de serre, ainsi que la surpêche. Mais ce qui peut être davantage préoccupant est la position de l’Europe et des Etats-Unis qui, au Sommet de Nagoya, se placent du côté des industriels : l’Union européenne, qui a signé le protocole, souhaite que les entreprises ayant déjà déposé des brevets avant le protocole n’aient pas à indemniser les populations locales ; les Etats-Unis, quant à eux, ont bel et bien refusé de signer la convention sur la diversité biologique pour se pas inquiéter ses industries… On peut alors s’interroger sur la véritable vocation des Etats à défendre l’intérêt général… On peut également se poser la question de la prise en compte de la biodiversité par ces fameuses industries ? En l’absence d’une réglementation ou d’une fiscalité contraignante, faut-il se reposer sur la bonne volonté des différents secteurs économiques et industriels ? Etant donné le contexte actuel, les entreprises se préoccupent de leurs impacts : premièrement car la réglementation se veut de plus en plus rigoureuse (malgré tout) ; deuxièmement, car leurs activités dépendent souvent de la disponibilité des ressources naturelles ; et enfin, pour une question d’image. Mais est-ce suffisant face à l’urgence actuelle ?


Plus encore que l’Union européenne et les Etats-Unis, le Canada fait figure de mauvais élève. Du moins c’est ce qu’affirme notamment Stewart Elgie, professeur à l'Université d'Ottawa et président du groupe de recherche et de réflexion Sustainable Prosperity. Ce dernier accuse le Canada, qui possède l’une des plus grandes richesses naturelles au monde, d’être en retard par rapport aux autres pays dans la mise en place d’actions incitatives en vue de réduire les pollutions générées et préserver l’environnement (se plaçant au 29e rang sur 33 pays selon un rapport de l’OCDE). On se rappelle également que le Canada fait partie des pays (avec notamment le Brésil) qui sont contre la mise en place d’une taxe appliquée au secteur financier… En outre, selon cet expert, il convient de payer la ressource à son juste prix. Pour cela, il convient de donner une valeur aux ressources naturelles afin de les intégrer dans la « comptabilité nationale ».

Le Sommet de Nagoya fut également l’occasion pour l’économiste indien Pavan Sukhdev de présenter son étude intitulée « l’économie de la biodiversité et des services écosystémiques ». Cette étude commanditée par l’Union européenne en 2008 a pour but d’évaluer le coût sur l’économie mondiale de l’absence d’une politique ambitieuse en faveur de la biodiversité. Le Sommet fut ainsi l’occasion de présenter des chiffres. Les chiffres sont parfois les meilleures façons d’alerter les industriels. Ainsi, la perte de la biodiversité se répercutera de façon signifiante sur l’activité économique. Selon le rapport Chevassus-au-Louis sur « l’approche économique de la biodiversité », la perte de la biodiversité représenterait ainsi 7% du PIB mondial chaque année. La responsabilité des industriels est alors mise en avant car de la façon dont ils gèreront leurs impacts dépendra leur avenir.

Au sein du Museum d’Histoire naturelle se sont réunis le 19 octobre les représentants de grandes entreprises afin de traiter de la considération de la biodiversité dans leurs activités économiques. Parmi eux, Lafarge, Areva, EDF, Total, Bolloré, Veolia et Sofiprotéol. La journée est co-organisée par l’IUCN, l’ACFCI, le Medef et le Museum national d’histoire naturelle. Cet évènement fut notamment l’occasion de communiquer sur leurs « bonnes pratiques » et d’échanger sur la façon dont est intégrée la biodiversité dans leur stratégie de développement.
Au cœur des discours se trouve notamment le principe de compensation. En d’autres termes, il s’agit de compenser les pollutions générées par un investissement dans des projets favorisant le maintien de la biodiversité. L’occasion pour EDF de mettre en avant la façon dont a été prise en compte la biodiversité suite à la construction d’un barrage situé au sein d’une réserve naturelle du Laos: le montant de la compensation se chiffre à hauteur de 1 million de dollars qui sera versé tous les ans sur 30 ans à la Réserve nationale (cela laisse imaginer la hauteur des impacts générés par cette construction).

Cependant, la compensation n’est pas une solution optimale. En effet, l’évolution des écosystèmes et de la régénération des ressources comparée à la vitesse de la dégradation de ces espaces naturels est parfaitement inégale. Ainsi, certains scientifiques et experts présents ont permis de souligner deux points essentiels : il faut favoriser l’économie circulaire et surtout, mieux vaut anticiper plutôt que de compenser. D’autant plus que l’anticipation sera moins coûteuse que la compensation. Elle le sera, mais ne l’est pas encore nécessairement. L’une des raisons principales est que la biodiversité n’est pas encore parfaitement prise en compte dans le cadre des études économiques (et notamment dans le cadre des analyses coûts/avantages) du fait de l’absence de méthodes de monétarisation de la biodiversité.

Elisabeth Jaskulké, membre du groupe biodiversité du Medef, quant à elle, parle sans complexe et ira même jusqu’à dire qu’elle veut que la préservation de la biodiversité rapporte… Le secteur des assurances prévoit ainsi de créer des produits de prévoyance contre le risque de biodiversité.


En guise de conclusion, on peut alors relever une phrase provenant de l’économiste de l’environnement Yann Laurans. A la question de savoir ce qu’il manque à l’économie environnementale pour qu’elle soit placée au cœur des préoccupations gouvernementales, il répond : « C'est plutôt une question de volonté, de culture et de rapport de force. » Finalement, face à l’urgence, des décisions devront être prises rapidement sur le court, moyen, et long terme impliquant aussi bien les différents gouvernements (notamment les plus pollueurs, en évitant au maximum les effets du « passagers clandestins ») que les différents secteurs économiques et financiers.


Sources et compléments d’information :

Actu Environnement, « Business et biodiversité : un binôme contre nature ? » (20/10/2010)
http://www.actu-environnement.com/ae/news/entreprises-biodiversite-compatibilite-services-environnementaux-11207.php4

Le Monde, « Aujourd’hui, on consomme la nature sans en payer le prix » (21/10/2010)
http://www.lemonde.fr/planete/article/2010/10/21/aujourd-hui-on-consomme-la-nature-sans-en-payer-le-prix_1429229_3244.html

Cyberpresse.ca, « Biodiversité: un rapport de l'ONU réprimande le Canada » (20/10/2010)
http://www.cyberpresse.ca/environnement/201010/20/01-4334225-biodiversite-un-rapport-de-lonu-reprimande-le-canada.php

Vedura, « Biodiversité : le Sommet de Nagoya, crucial pour la sauvegarde des espèces » (19/10/2010)
http://www.vedura.fr/actualite/6765-biodiversite-sommet-nagoya-crucial-sauvegarde-especes

20 minutes, « Les entreprises changent la biodiversité en argent », (1910/2010)
http://www.20minutes.fr/article/610337/planete-les-entreprises-changent-biodiversite-argent


mardi 19 octobre 2010

L'Etat et la croissance verte


Le contexte politique est à la rigueur. La protection de l’environnement reste malgré tout parmi les priorités du gouvernement mais une question subsiste : comment financer une politique plus accès sur l’écologie ? Le gouvernement cherche ainsi à concilier croissance à l’environnement et ainsi de créer une véritable « croissance verte ». Mais faut-il développer la croissance verte à tout prix ? On peut également s’interroger sur le rôle de l’Etat dans le développement de cette nouvelle dynamique économique. Parmi les leviers, il y a notamment la fiscalité et la réglementation. Ainsi, en cette fin d’année, plusieurs rapports ont été présentés afin d’orienter les nouvelles décisions de l’Etat qui transparaitront notamment dans la loi de finances de 2011.


OCDE : une fiscalité verte en faveur de l’innovation


Dans un rapport intitulé « Fiscalité, innovation, environnement », publié le 13 septembre dernier, l’OCDE argumente sur le fait que la fiscalité écologique permet de stimuler l’innovation et ainsi de favoriser une croissance verte. En effet, en répercutant le coût de la pollution sur les entreprises, celles-ci seraient amenées à développer de nouvelles technologies « propres » en vue de réduire les pollutions qu’elles génèrent. Les outils tels que les permis négociables ou les écotaxes constituent selon elle les moyens d’action les plus efficaces en matière de politique environnementale. Ils constituent dès lors un signal fort de la part des pouvoirs publics qui permettraient de modifier efficacement les comportements des divers acteurs économiques. L’OCDE cite ainsi diverses expériences réussies : la taxe Levy du Royaume-Uni ainsi que la taxe sur les émissions de NOx en Suède auraient incité les entreprises à déposer plus de brevets sur les technologies « propres » ; et, concernant le cas d’Israël, les nombreuses restrictions sur l’eau ont permis de développer la créativité des entreprises afin de mieux gérer leur consommation en eau.


Rapport Attali : l’environnement dans une approche ultralibérale

Le 15 octobre, la commission Attali met l’environnement au cœur de son rapport « pour la libération de la croissance française » destiné au gouvernement. Ce rapport qui met en avant 27 propositions en vue de réduire la dette de l’Etat distingue deux priorités à long terme : l’éducation et les grands secteurs de croissance parmi lesquels l’environnement. Ainsi, la commission Attali préconise trois directions :

- « Etablir la vérité des prix écologiques par l’instauration d’une taxe carbone, si possible au niveau européen ». Il s’agit de répercuter sur les prix les externalités négatives générées par le produit consommé sur l’environnement.

- « Préparer le pays au renchérissement des matières premières », c’est-à-dire développer le marché de l’énergie en Europe

- « Mieux valoriser nos atouts dans la gestion des ressources rares » en développant l’innovation et la recherche, notamment dans le domaine de l’agriculture, et en lançant une véritable politique de la mer en explorant davantage les fonds marins (on peut alors se demander si la commission a bien intégré la problématique de la pêche intensive…).

Si ces objectifs sont relativement raisonnables, il n’en pas nécessairement des moyens à mettre en œuvre selon le rapport. Ainsi, la commission considère que le principe de précaution est à circonscrire au profit de la prise de risque nécessaire à l’innovation. La dissociation du principe de précaution à l’environnement dans ce contexte revient à mettre l’environnement au service de la croissance et non l’inverse. La croissance verte présente ainsi certaines limites. Par ailleurs, le rapport qui présente des solutions ultralibérales notamment et surtout sur l’aspect social a été vivement critiqué par les différents partis politiques.


Sources et compléments d'information:

Le Journal du Développement Durable, OCDE : Les écotaxes pour doper la croissance verte

http://www.developpementdurablelejournal.fr/spip.php?article7080


Rapport de la Commission Attali

http://www.liberationdelacroissance.fr/files/rapports/CLCF_Rapport_2010_Une_ambition_pour_dix_ans.pdf


jeudi 14 octobre 2010

La forêt au coeur de l'actualité



Libération a publié le 09 octobre dernier un extrait de l’ouvrage « Atlas des forêts dans le monde » des Editions Autrement, nous donnant un état des lieux sur les surfaces forestières mondiales. Si dans certains pays la forêt semble progresser (pays postindustriels occidentaux, pays à forte démographie tels que l’Inde et la Chine ou les pays de faible peuplement forestier tels que l’Egypte ou la Mauritanie), d’autres tels que le Brésil ou l’Indonésie voient leur surface forestière diminuer de façon alarmante. Parmi les causes, la progression des cultures commerciales (exploitations d’huile de palme et de soja) ou les exploitations industrielles ou minières non contrôlées. Cet état des lieux est indispensable afin de mettre en place des solutions rapides et adéquates pour limiter la déforestation qui est en partie responsable du réchauffement climatique. La forêt est ainsi au cœur de l’actualité : elle intéresse aussi bien les industriels qui souhaitent reverdir leur image ou compenser leurs émissions de CO2, tout comme les différents Etats dont la France qui, face à l’urgence, proposent de nouvelles solutions de financement.


« Gestion » de la forêt par les industriels : actualités


France Nature Environnement pointe du doigt une initiative émanant de Veolia Energie – Dalkia visant à « nettoyer » les forêts. Leur slogan : « Pour nous, nettoyer la forêt, c’est créer de l’électricité et de la chaleur ». Le terme de nettoyage paraît absolument inadapté dans le sens où les bois et branchages « trainant » au sein de la forêt sont indispensables à la dynamique de l’écosystème. Au-delà de la problématique centrale liée à la gestion forestière qui sera au centre des discussions des sommets d’Etats, il se pose encore une fois une question de communication. Comment Veolia peut ainsi prétendre nettoyer les forêts pour justifier son activité? Veolia Environnement alimente régulièrement de bonnes pratiques le site Internet de Global Compact qui a initié l’action « Communication on progress ». S’il est important de mettre en avant les bonnes initiatives afin de contribuer à mettre en marche une dynamique en faveur d’un développement durable, il est également important de bien communiquer sans se laisser tenter par les dérives du greenwashing.

Par ailleurs, d’autres entreprises interviennent en faveur de la protection des forêts. Ainsi, Shell et Gazprom ont récemment participé au financement du projet « Rimba Raya » en Indonésie qui fait partie du programme de conservation des forêts tropicales. Cette action émanant de la part de ces industriels s’inscrit dans le cadre du programme REDD (« Reducing Emissions from Deforestation and Forest Degradation ») qui permet aux grandes entreprises de compenser leurs émissions de CO2 en finançant des projets de lutte contre la déforestation. Il s’agit donc pour ces entreprises de compenser les externalités négatives générées par leur activité. Malgré tout, le financement de ce projet n’a pas fait l’objet d’une quelconque campagne de communication.

Vers un Fonds mondial de Reboisement et d’Adaptation au Changement Climatique

Un rapport déposé par M Le Guen (député UMP) à l’Elysée propose la création d’un Fonds mondial de reboisement et d’adaptation au changement climatique (FRAC). L’objectif est notamment de constituer une aide internationale visant à amener les pays dits forestiers à ''passer d'une politique d'exploitation à une politique de préservation''. Ce fonds serait alimenté par de nouvelles taxes mondiales appliquées à des activités telles que les huiles végétales, les carburants fossiles ou l’électricité, et, éventuellement sur les flux financiers ou informatiques. Par ailleurs, le chef d’Etat a fait savoir son intention d’orienter une partie des fonds issus de la taxe financière à des programmes de revalorisation forestière. Ainsi, la proposition d’un tel fonds sera abordée lors du sommet de Cancun. Ce fond viendrait ainsi s’ajouter au Partenariat mondial pour la forêt engageant 9 pays qui a été officialisé en mai dernier lors de la conférence d’Oslo. Cet engagement se caractérise par un financement à hauteur de 5 milliards de dollars sur la période 2010-2012. Un financement qui semble à la hauteur des enjeux, d’autant plus s’il engageait plus de 9 pays…


Sources et compléments d'information:


Actu Environnement - Lutte contre la déforestation : la France plaide pour des financements ''innovants'' (13/10/2010)
http://www.actu-environnement.com/ae/news/fonds-leguen-sarkozy-reboisement-taxes-redd-11175.php4

Le Figaro - Forêts: la France pour un fonds (12/10/2010)

http://www.lefigaro.fr/flash-actu/2010/10/12/97001-20101012FILWWW00718-forets-la-france-pour-un-fonds.php


Libération – Elle court, elle court, la forêt… (09/10/2010)
http://www.liberation.fr/terre/01012295215-elle-court-elle-court-la-foret

France Nature Environnement - DALKIA passe les forêts au karcher pour faire de l’énergie ! (11/10/2010)
http://www.fne.asso.fr/fr/dalkia-passe-les-forets-au-karcher-pour-faire-de-l-energie.html?cmp_id=33&news_id=1821&vID=49

REDD Monitor – (08/09/2010)
http://www.redd-monitor.org/2010/09/08/indigenous-environmental-network-and-friends-of-the-earth-nigeria-denounce-shell-redd-project/

mardi 12 octobre 2010

Semaine du goût : et si on en parlait ?


Alors que José Bové comparaissait ce lundi devant la justice pour avoir détruit, à l’aide de 86 faucheurs volontaires, près de 15 hectares de maïs OGM en 2006, Quick lance en cette rentrée son hamburger bio. Si ces deux actualités ne sont pas similaires (puisque l’une traite des OGM et l’autre du bio), il paraît difficile de ne pas les associer. On se rappelle non sans mal de l’affaire du McDonald’s de Millau de 1999 où José Bové avait alors entrepris un « démontage » du restaurant de fastfood américain. Son action visait alors à protester les sanctions des Etats-Unis affligées à l’UE pour avoir bloquer les importations de viande de vaches élevées aux hormones de croissance. Cet incident mettait ainsi les fastfoods, représentants de la « malbouffe » au centre de la polémique environnementale. En parallèle de la semaine du goût qui a lieu du 11 au 17 octobre, l’actualité s’intéresse à ce qu’il y a dans nos assiettes.

Le bio : nouvel engagement de Quick ?

Depuis quelques temps, et à l’image de ce nouvel hamburger « bio », les restaurants de fast food tentent de redorer leur image en servant des produits de meilleures qualités. On peut ainsi lire dans le rapport RSE de Quick que l’environnement fait partie intégrante de « l’esprit Quick ». Mais qu’est-ce exactement que « l’esprit Quick » ? Et comment l’environnement s’y intègre-t-il ? L’esprit Quick, selon le rapport, c’est, notamment, utiliser des emballages recyclables et biodégradables ; c’est veiller à la traçabilité des produits et notamment de la viande qui provient d’une agriculture plutôt locale ; c’est réutiliser les 4 400 tonnes d’’huile de friture comme biocarburant et utiliser des produits de nettoyage moins polluants. L’environnement a donc bien été intégré à la politique stratégique de l’entreprise Quick… mais est-ce assez ? Car l’esprit Quick est également de faire du bio mais pas trop, et de proposer des produits qui font partie de la liste noire de la diététique. On peut également regretter le manque de suivi des performances « environnementales » et le nombre restreint d’action allant en ce sens. En d’autres termes, le rapport RSE se veut à l’image de son action en faveur de l’environnement et à l’opposé de la qualité nutritive de ses hamburgers : c’est plutôt léger. Le bio semble être avant tout un marché de niche avant d’être un véritable engagement environnemental. Finalement, Quick fait surtout une promesse notamment via ses messages publicitaires, c’est le goût. Et là encore, il semble y avoir un bémol : l’Express lui fait mauvaise presse en indiquant que ses journalistes testeurs ont trouvé ça plutôt moyen et qu’ils ne l’achèteront pas de nouveau… Mais peut-être ne font-ils tout simplement pas partie de la cible…

Par ailleurs, moins de pesticides dans nos assiettes, c’est ce à quoi s’est engagé le Comité national d’orientation et du plan Ecophyto : l’objectif étant de réduire de moitié l’usage des pesticides d’ici 2018. Affaire à suivre…


Les OGM : quoi de neuf ?

Qu’en est-il du côté des OGM ? Actu Environnement a publié un article le 7 octobre dernier afin de traiter du statu-quo français sur les OGM. La France traine les pieds à l’idée de transposer la directive européenne sur les OGM adoptée en 2001. Le Parlement français a bien adopté la loi OGM en 2008 prévoyant 'la liberté de consommer et de produire avec ou sans OGM'', mais celle-ci n’est pas encore applicable : seuls 9 textes réglementaires sur les 19 nécessaires ont été publiés. Principe de précaution pour certains, ceci constitue de véritables mesures protectionnistes pour d’autres. Par ailleurs, l’Union européenne est aujourd’hui dépendante des importations de protéines végétales pour l’alimentation animale ; aussi, le soja est aujourd’hui constitué à plus de 90% d’OGM. Ainsi, principe de précaution ou non, il semble que les OGM soient déjà dans nos assiettes de façon directe ou indirecte. Pourtant, il semble que les européens n’en veulent pas : plus d’un million de personnes ont signé la pétition de Greenpeace, lancée en mars 2010, réclamant un moratoire sur les OGM en Europe suite à l’autorisation d’une variété de pommes de terre par Bruxelles. Après un « test d’admissibilité », la Commission aura un délai de réponse de 4 mois. Cela pourra démontrer à quel point une telle initiative citoyenne permet d’orienter la politique européenne.


Alimentation et environnement sont intimement liés et méritent une attention très particulière. Ainsi, une étude scientifique effectuée par Barilla Center for Food & Nutrition (BCFN) intitulée « Double Pyramid: Healthy Food for people, sustainable food for the planet » et présentée aujourd’hui à Bruxelles a démontré, comme son titre l’indique, qu’un régime alimentaire sain est également bénéfique à l’environnement. Encore faut-il que les intérêts économiques ne prennent pas le dessus sur la santé et l’environnement… L’objectif aujourd’hui est d’adapter la réglementation à ces enjeux tant au niveau français qu’européen et de convertir le marché à un mode de consommation plus sain. Ceci passe notamment par un meilleur accès à l’information sur ce qu’il y a dans nos assiettes… Plus qu’une histoire de goût, il s’agit d’une histoire de santé et d’environnement.


Sources et compléments d'information:

Actu Environnement - OGM : un statu-quo français problématique (07/10/2010)
http://www.actu-environnement.com/ae/news/ogm-11136.php4

Euractiv:
La première initiative citoyenne a atteint le million de signatures (07/10/2010)
http://www.euractiv.fr/initiative-citoyenne-atteint-million-signatures-article

Yahoo News - Maxi Sciences -
OGM : ouverture du procès de José Bové et 85 autres faucheurs (11/10/2010)
http://fr.news.yahoo.com/68/20101011/tsc-ogm-ouverture-du-procs-de-jos-bov-et-04aaa9b_1.html

Pr NewsWire:
Healthy Food is Good for the Environment, Finds Major Think Tank Study (12/10/2010)
http://www.prnewswire.com/news-releases/healthy-food-is-good-for-the-environment-finds-major-think-tank-study-104754164.html

L'Express: On a testé le sandwich bio de Quick

http://www.lexpress.fr/styles/saveurs/on-a-teste-le-sandwich-bio-de-quick_921209.html